C’est parfois difficile de dire à quel point certaines choses nous manquent ; le chant des goélands qui tournoient autour des chalutiers d’un petit port de pêche, l’odeur âcre de l’eau qui clapote sur les coques en bois verni ou la lumière crue qui émane du sable blanc en plein après-midi. Tout ceci fait partie du domaine du rêve et des réminiscences, mais lorsqu’il s’agit d’habitudes, difficile d’y renoncer. Plus difficile encore l’aveu saugrenu qui consiste à dire qu’on n’écrit plus et que c’est compliqué de s’y remettre sérieusement, parce que la vie est là, que la fatigue est de plus en plus présente au fur et à mesure que la journée avance, la journée avec son stress et ses vexations ou ses petits bonheurs si rares qu’il faut savoir les attraper avant qu’ils ne fuient comme des pinsons sous un tir nourri de caillasses, et que le sommeil nous accroche sans prévenir et déjà, il est temps d’aller se coucher.
Aujourd’hui, je ne me sens pas encore faire partie de ceux qui baissent les bras facilement et qui se passent à autre chose de moins intéressant, parce que c’est plus facile de se laisser tirer vers le bas que de… enfin voilà. J’ai encore des choses à dire, des brindilles d’arc-en-ciel à décrocher et à faire partager.
Un disque dur grillé plus tard (la chaleur a eu raison de ses secteurs), des milliers de photos errant dans les limbes tels des petits enfants morts sans baptême, quelques films culte désormais voués au culte des morts, je trouve que je prends plutôt bien les choses, ce qui me fait dire que je ne suis pas non plus complètement éteint et socialement défaillant. Je crois qu’il reste encore pas mal de choses à faire dans les parages
Celui qui marche sur l'estran au loin parmi les rochers affleurants et leurs berniques de pierre
Plus de mots, juste des images. Le temps est à l’économie, l’esprit coincé dans le viseur de l’appareil, entre autres choses. Des centaines de photos, à peine quelques unes qui me plaisent vraiment, pas tellement pour des raisons sentimentales ou quoi que ce soit qui ait rapport avec l’affect.
Un bocal dans lequel j’ai ramassé du sable de ma petite grève à l’extrémité nord de la Bretagne et des petits cailloux noirs comme la roche des volcans qui traînaient sur le sable apportés par les vagues brutales et bleues comme nulle part, impossible à rendre sur la pellicule. Posés là par le jeu hasardeux des mouvements.
Et ce sont aussi des histoires d’amours légères qui vont et qui viennent, avec la route ou le rail, l’intimité des forêts épaisses et humides ou les jardins tirés au cordeau du château qui surplombe le coude de la rivière. Une construction de bois, un promontoire en forme de mirador pour admirer le trafic des voiliers.
Et ça se termine comme ça.
Couleur de feu au bord de l'eau
Chi ha inventato la fotografia?
Associer le doux chant de l’italien aux charmes d’une photographie triée sur le volet et commentée de la plus belle façon qui soit, voilà le pari réussi d’Hippolyte Bayard, dont le nom ne laisse pas forcément supposer qu’il s’exprime dans la langue de Goldoni dont le nom répond à la question posée par la titre du billet (oui, je sais). Un blog simplissime qui donne envie d’explorer les pistes qu’il laisse entrouvertes, comme par exemple ces superbes images signées Frédéric Delangle.
The things i do, the things i see
Deux versants d’une même personne, deux visions différentes dans les choses que je fais, les choses que je vois.
D’un côté, un travail consciencieux sur la granularité du monde, sa rudesse dans une vision picturale assise.
De l’autre côté, des images volées dans des films ou des livres, un travail de recueil de l’univers ambiant.
On retrouve de nombreux clichés sur boahaza.net, le site de Boaz Aharonovitch, des travaux d’une vision de tous les jours dans ce que le quotidien a de plus simple au travers d’images claires et familières. Aucune prétention, juste du factuel.
:: H & A ::
Le principe des sites que l’on trouve sur Tumblr est tout simplement de publier ce qu’on veut en respectant l’indication de la provenance. Voici une immense communauté d’amoureux des images, du pire au meilleur qui permet d’entrer dans l’univers d’une personne au travers des images qu’elle choisit.
:: H & A :: est un de ces sites et j’aime particulièrement les couleurs des photos, la touche fraîche et tropicale de certaines des photos qu’on y trouve. Un lieu que j’aime hanter.
Scarabaeoidea
Photo © Midnight Digital
Peut-être ai-je perdu une part de mon âme à ne plus désirer écrire… Peut-être me suis-je un peu laissé gagner par la moribonderie d’un ciel noir et d’une pluie glaciale au-dessus de ma tête… Mais je garde en tête ces mots d'Edgar Varèse, The present day composer refuses to die.
Alors plutôt que prédire la fin propre d’un univers familier ne faisant que me caresser avec le baûme lénifiant de l’oisiveté, je me laisse bercer par les espoirs d’une renaissance complète.
Dans la lumière blafarde du hall d’entrée, une tache noire rampe sur le carrelage. Un petit scarabée à la carapace irisée s’est faufilé sous la porte.