J’avais déjà parlé de Colour Lovers il y a quelques temps comme d’un lieu exceptionnel dédié à la couleur et aux palettes de couleurs, un lieu privilégié où l’on glorifie l’harmonie des couleurs et leur intégration. Le très beau site a consacré un article superbe aux papillons. De très jolies palettes.
Torii
Photo © e-chan
Je me trouve devant un symbole shintô ; pour la première fois, je contemple un torii. Comment décrire un torii à ceux qui n’en ont jamais vu, même en gravure ou en photographie ? Deux hautes colonnes comme des piliers de grille supportent horizontalement deux poutres, dont la poutre inférieure, qui est aussi la plus légère, a ses extrémités enchâssées dans les piliers à quelque distance de leur sommet ; tandis que la poutre supérieure, qui est aussi la plus lourde, est posée à plat sur les colonnes, et les dépasse largement à droite et à gauche. Ça, c’est un torii : la construction varie peu de forme, qu’elle soit faite de pierre, de bois ou de métal. Mais cette description ne peut donner une idée correcte de l’aspect majestueux d’un torii, de sa suggestion mystique en tant que portail. La première fois que vous voyez un noble torii, vous vous imaginerez peut-être voir le modèle colossal d’une belle lettre chinoise se dressant contre le ciel ; car toutes ses lignes ont la grâce d’un idéogramme animé, les angles et les courbes hardies de caractères tracés en quatre coups de pinceau magistraux.
Lafcadio Hearn, Ma première journée en Orient
Matt Palmer
Visions décalées d’un monde coloré ou gazéifié ou encore pétillant, visages torturés, la ville acide ou la nature gentiment décrépie… Matt Palmer.
Enfermement et libération – David Maisel
Certains photographes jouent parfois sur des opposés qui ne sont a priori pas évident au premier coup d’œil, mais une vision globale de l’œuvre permet d’en imaginer les mécanismes intimes. David Maisel, photographe de haute altitude, compose des œuvres avec les replis de la terre et ses circonvolutions, mais il erre également dans l’univers carcéral psychiatrique de l’Oregon, dans une démarche qui tend réellement vers les extrêmes.
Lenz – Georg Büchner
Photo © Giorgio Raffaelli
Neige en altitude, sur les flancs et les sommets ; et dans la descente des vallées, pierraille grises, étendues vertes, rochers, sapins. L’air était trempé et froid ; l’eau ruisselait le long des rochers et sautait en travers du chemin. Les branches des sapins pendaient lourdement dans l’atmosphère humide. Des nuages passaient dans le ciel, mais tout était d’une densité… puis le brouillard montait, vapeur humide et lourde qui s’insinuait dans l’épaisseur des fourrés, si molle, si flasque.
Lenz est un personnage étrange que j’ai eu l’occasion de rencontrer sous la plume de Deleuze et Guattari dans l’Anti-Œdipe. N’ayant pour habitude de lire des auteurs allemands, je me suis demandé quelle vision déformée je pourrais avoir de cette nouvelle incroyablement riche, écrite pas Georg Büchner d’après une lettre de Johann Friedrich Oberlin, dans laquelle on découvre l’errance d’un jeune homme (Jakob Michael Reinhold Lenz) perdu dans la forêt humide et froide des abords de la frontière franco-allemande. Le récit est, on le sent clairement, écrit d’un seul tenant et m’a laissé sceptique et froid, malgré d’évidentes qualités littéraires.
Finalement, c’est dans la note de Jean-Pierre Lefebvre que je trouve une explication à ce texte à la fois beau et glacial comme une bourrasque de vent neigeux.
L’essentiel demeure cependant l’irruption. Celle d’un homme un beau jour quelque part chez un autre. L’événement du 20 janvier. La date-schibboleth. L’événement qui souvent se présente dans la bouche de l’insensé, ou l’énigme de l’absurde. Les mots de l’insensé comme la majesté de l’absurde doivent être recueillis dans la transparence réelle qu’octroie parfois la nature. Sans fanfreluches poétisantes. Dans cette montagne aride et rude, les toponymes eux-mêmes en disent souvent la rupture, se terminent par bruch, bach, rupt…
Maison Guthrie, Santiago
Une superbe réalisation qui prend en compte la pente naturelle du terrain, un lieu de vie réalisé comme un mirador naturel…
Voir aussi chez Modern Residential Design.
Maison du Bois, Cachagua
Terry Evans
La photographie de Terry Evans ne se contente pas de montrer, elle referme une véritable vocation didactique et naturaliste. De superbes séries.
Terry Evans est également à l’origine du projet Revealing Chicago, un vision thématique et très agréable de toute la région de Chicago se déroulant sous forme de carte interactive.
Xavi Moya
A méditer en silence… Xavi Moya.
Abandon et délabrement industriel
J’ai commencé ma plongée dans les univers sombres du délabrement et de l’archéologie industrielle lorsque j’étais adolescent, au contact d’un livre superbe sur l’archéologie des temps modernes – terme qui peut paraître antinomique mais qui reflète l’esprit post-moderniste ou post-industriel – et j’ai commencé à en parler ici avec Stahlseite. Ce qui est fascinant dans ce domaine de la connaissance humaine, c’est de pouvoir approcher une face de l’activité humaine qui a tout à la fois d’éphémère et en même temps de profondément ancré dans la technique et la complexité, ce qui laisse supposer que plus nous apprenons de la technique, plus nous la maîtrisons, moins on éprouve le besoin de la faire perdurer dans le temps, dans une sorte de mouvement à la vitesse exponentielle qui me donne sans arrêt l’impression que la fin des temps ne peut être que l’aboutissement de cette course à la maîtrise de la nature, dans ce qu’elle a de plus artificiel.
Voici ce que j’ai trouvé de plus beau sur Flickr, une collection rare et nécessairement précieuse.
Une superbe collection foisonnante signée Charles Bodi, Urban Exploration.
En particulier son très beau set consacré à the Hearn, une usine thermale toujours en activité.
Industrial Decay pool.
Mention spéciale à Patrick Boury, un fou qui a au moins 10000 photos à son actif. Passionnant, on pourrait y passer des heures.
Gowanus, une vision dépréciative et anti-conformiste de New-York.
Visions apocalyptiques et fascinantes d’un monde en rupture avec ses idéologies.
Les explorations urbaines de Ollena Sullivan, parfois colorées, montrent un visage de la ville audacieux.
Encore New-York, presque anecdotique, mais tellement sensuelle…