Une photographie drôle et pleine de subtilité. Matt Stuart.
Dark Sea
Le côté couloir
Je pense que l’idée du couloir, qui fait que j’ai pris ces photos en hauteur, était très importante. On s’aperçoit d’ailleurs que les images les plus intéressantes ne sont pas celles qui s’approchent de la bonne photographie, mais ce sont plutôt des choses qu’on n’a pas l’habitude de voir en photos. Des coins de route, des choses comme ça, tout le contraire de ce que j’ai fait quand j’avais 30 ou 40 ans. J’ai photographié des choses qui d’ordinaire ne sont pas à photographier, qui ne sont pas interdites mais qui, a priori, ne présentent pas d’intérêt. Des lieux où l’on peut imaginer qu’un jour on s’est trouvé à attendre un autobus, à attendre quelqu’un, parce qu’on était en panne, que l’on a marché et on s’est assis sur un banc, ou en roulant avec une voiture, cette espèce d’observation silencieuse. Et c’est vrai que le côté route ou le côté rail, le côté couloir, avait son importance dans le choix de la prise de vue en hauteur.
Raymond Depardon, Errance
Comment photographier de la même manière après ça ? Depardon dit tout ce que j’ai toujours cherché dans les arts visuels, dans la photographie, l’architecture et l’écriture, tout ce en quoi je suis en recherche. Une démarche simple et décalée, comme si on était toujours à côté du sujet.
Une autre manière de se recentrer dans le monde…
Paris en noir et blanc
Stephen Wilkes
La photographie de Stephen Wilkes est faite d’ombres et de lumières, de noirs et de blancs, de points de fuite et de perspectives, de relations d’intérieurs et d’extérieurs, une photographie de laquelle se dégage une ambiance feutrée et silencieuse, une magie douce qui trouve son point d’orgue dans les motifs et la simplicité d’une image dépouillée, à la limite de l’esquisse.
Your daily dose of design inspiration & Joey Lawrence
Lorsqu’un site passe par le visuel pour accrocher le regard, ça fonctionne souvent mieux que lorsque on signale un lien par du texte. J’ai remarqué au fur et à mesure du temps, que l’illustration, forcément partiale, attirait plus le regard, donnait plus envie de cliquer et de se perdre.
The Serif fait partie de ces refuges que j’aime visiter. De plus en plus, les blogs adoptent des sous-titres, une annonce accrocheuse ; la sienne est “Your daily dose of design inspiration” et je trouve que ça colle parfaitement. Alliance parfaite de sobriété et de fantaisie, c’est lieu riche et somptueux.
J’y ai découvert, entre autres choses, le portfolio flamboyant et baroque de
Joey Lawrence, un photo-reporter un peu déjanté qui traîte aussi bien des sujets légers que la tristesse ineffable des sans-domicile.
Le porno chic clean et sale de Terry Richardson
Terry Richardson a tout du type franchement répugnant. A mes yeux, il a quelque chose d'Hunter S. Thompson dans sa manière de raconter les choses, par l’image. Provocateur extrême n’hésitant pas à photographier Kate Moss, nu – lui, pas elle – sur la plage ou se faisant photographier à poil, voire dans des situations pour le moins originales, Terry Richardson passe pour un gros dégueulasse et c’est ce qu’il est apparemment.
Pourtant, les très hype ou très luxe n’hésitent pas à faire appel à lui pour des campagnes de pub très ciblées. Ainsi, ses photos font souvent la une de Vogue et les produits pour lesquels il a vendu ses services ne sont ni plus ni moins que des marques de luxe, des parfums ou des vêtements haut de gamme.
Ainsi, Sisley n’hésite pas à lui demander de jouer la provocation avec cette publicité comparant le parfum à une drogue que sniffent deux junkies. L’univers de Terry Richardson est comme divisé en deux parties. Une face très luxueuse avec des photos léchées presque atones et stérilisées, une autre franchement cradingue, crue, à la limite de l’obscène.
C’est ce qu’il y a de fascinant en lui.
L'errance involontaire sur la terre natale
Je n’ai pas fait exprès de prendre cette photo. Je me suis arrêté sur le bord de la route là où je n’avais jamais fait que passer sans réellement faire attention à tout ce qui se trouvait autour de moi. Pourtant, cette photo reflète tout ce qu’est ma vie. C’est ma terre natale, ma terre nourricière, c’est Montesson, une petite ville des Yvelines, coincée entre une grande plaine maraîchère et la réputation altière du Vésinet. En prenant cette photo, j’ai honteusement copié – pardon, je rectifie – j’ai scrupuleusement respecté les termes de la photo de l’Errance de Raymond Depardon. Prise de vue verticale, cadrage strictement centré, pas de sujet, une photo qui vit pour elle-même sans rien dire, ne fait que capturer l’essence d’un lieu comme si on y était plongé par hasard… L’essence de l’errance.
Tout se lie, Depardon cite Jacques Rancière, un des professeurs de Paris VIII-Saint-Denis qui m’a le plus marqué[1] dans ma vie d’étudiant: «Une chose est intéressante lorsque la forme naît d’elle même et qu’elle est le produit d’un calcul». La confiance dans le réel comme une forme passive. Cette photo est importante pour moi car elle marque le début de la compréhension de l’image comme un rapport au monde, une mondanité qui prend ses racines dans l’univers connu.
Note:
[1] Rancière est élève d’Althusser, de tradition marxiste.