Au bout d'un moment il faut jeter un pavé dans la marmite de soupe aux cailloux et si possible le faire en une seule phrase

Il s’est passé en moi quelque chose de très étrange, en ceci que je considère la lecture présente d’un petit livre que j’ai acheté uniquement parce que la couverture me plaisait, comme un réel événement qui a déclenché toute une série de choses qui m’ont beaucoup fait réfléchir sur la façon dont certains écrivains écrivent, car en l’occurrence, c’est un livre – dont je tairais le nom de l’auteur, je risque d’être un peu vexant – que je considère comme pas très bon, même si au début, la première réaction a été de me dire “mais voilà, c’est ça qu’il faut que je fasse !!” parce que le livre est construit autour d’anecdotes du quotidien, fait de petits textes mis bout à bout, dans l’ordre chronologique, datés ou géolocalisés ou non, anecdotes qui dès les premières lignes m’ont beaucoup plu – le traître ! – et qui très vite deviennent d’un ennui mortel, qui, certes, est compensé par un très bon style, fluide, de belles métaphores sous laquelle on sent la maîtrise, mais au bout du compte, on se sent comme floué d’être entraîné dans un labyrinthe ennuyeux et sans beaucoup de couleurs, une sorte d’exercice de style auquel il manquerait l’originalité ou le désespoir de ce qui fait une belle oeuvre, et pour revenir à ce que je disais tout au début de ma phrase – car oui, je n’écrirai qu’une seule phrase – c’est en lisant ces premiers textes que je me suis enfin décidé à rassembler toutes mes petites chroniques, à les ordonner, les corriger, les peaufiner pour en faire un volume construit qui, au moment où je parle – dans une sorte de coming-out honteux – est peut-être déjà entre les mains d’un comité de lecture dans une petite maison d’édition, chose pour laquelle je suis reconnaissant à l’auteur indigne de ce livre, et désormais, j’en suis à comparer – mais quelle prétention ! – les deux ouvrages, pourtant différents, en premier lieu parce que la différence principale tient en ceci que le mien n’est pas édité – le fait est que ce sont des textes de la même nature que les miens, collectés sur plusieurs années, une dizaine, là où moi je les ai collectés sur une seule année -, et ce qui me frappe, c’est que je trouve, pour une fois, que ce que j’ai écrit est bon, oui, c’est étrange, mais je le ressens comme ça, et il semblerait que je ne sois pas le seul à penser cela – un lectorat, même s’il n’est composé de quelques âmes bienveillantes, dont les mots sont encourageants, voire élogieux ne peut qu’être un bon signe -, aussi, et c’est là mon propos de départ, j’imagine que le livre du monsieur a été publié parce qu’il est par ailleurs l’auteur d’autres livres, ce qui n’est pas mon cas, et j’ose avoir la vanité de croire, en comparaison avec mes écrits, que si je ne suis pas publié dans les prochains mois, ce ne sera que par l’entremise d’une injustice sérieuse, laquelle sera de toute façon réparée un jour ou l’autre, au prix de ma persévérance, car comme vous avez pu le constater, je suis déjà en train de préparer d’autres textes, que vous avez tous pu lire sous l’intitulé “Domino Days“, billet protégé pour lequel tout le monde m’a demandé le mot de passe (lequel se trouve être “poulet”, au cas où ça intéresse quelqu’un, ingrats !!).

L’étrange philosophie du poulet dans le carton à chapeau et autres rêves mystiques

Ce onze juin, il flottait dans l’air un parfum de dilettantisme, un je ne sais quoi de purement foutraque et déjanté. Il est question que je parte en train sur Amiens, je dois y être à neuf heures du matin. A moitié endormi après un week-end au soleil, je me vois refuser l’accès au quai de la gare parce qu’une affreuse bonne femme a décidé de composer son programme télé de la semaine devant le tourniquet. Je commence à maugréer alors que j’ai encore les yeux collés de sommeil et ça ne fait que commencer, parce qu’elle me poursuit jusque dans le train pour Gare du Nord en s’asseyant en face de moi, jambes écartées, toujours son télé Z collé aux lunettes. Ses genoux frôlent les miens et ça a le don de m’agacer, je déteste les contacts physiques, même involontaires, avec des personnes que je ne connais pas. Contrairement aux gens que je côtoie dans le RER, j’ai l’impression de me retrouver ici en compagnie du rebut de l’humanité, une vraie cour des miracles roulante. Les gens sont particulièrement laids et terrassés par la fatigue. J’arrive à Gare du Nord, et il me semble que l’espace d’un instant, j’avais dû oublié que je m’étais réveillé dans une France bleue, une France qui me fait peur et que je n’ai pas choisi. Il fait moche depuis les élections, le temps est atrocement gris et plombé. C’est donc ça que veulent mes compatriotes ? Mon pays me fait peur. Qu’est-il devenu ? Un pays d’individualistes haineux?

Photo © trixrabbit20069

Sur le quai de la Gare, j’aperçois les filles. Florence me saute presque au coup et me fait la bise. Du coup, je fais aussi la bise à Delphine. Pas l’habitude d’embrasser mes collègues de travail, mais je m’y plie facilement. Ah et puis merde hein, on ne va tout de même cracher dans la soupe. En parlant de soupe, une fois la formation du matin terminée, nous sommes allés déjeuner au Carlton. Ouais, rien que ça. M’en fous, j’ai pas payé. L’après-midi s’est déroulée tranquillement, entre deux rots, un de digestion, et l’autre de contentement.

Un peu claqué, un peu naze, je sors de la boîte de jazz, je suis rentré dans la gare et mon attention s’est trouvée attirée par une dame chargée comme un bourricot (à moins que ce ne fût le contraire). Visiblement peu en confiance, elle a réussi à faire tomber sa valise dans les escaliers sur les quatre dernières marches. Un peu plus loin, arrivée devant la porte du train, elle a dû esquisser un freinage mal contrôlé ; sa valise est tombée à nouveau et emportée par le poids des deux sacs qu’elle portait en bandoulière, son corps a basculé en avant, l’emportant sans qu’elle n’ait eu le temps de se retenir. Elle a manqué de tomber entre le train et le quai, si seulement sa tête ne s’était pas écrasée contre la marche en métal du train. Pourtant, c’est écrit partout “Attention à la marche…” Boudiou que ça devait être douloureux, mais désolé, j’ai un train à prendre. Nous nous sommes regardés avec Florence, contenant un rire préhistorique dans nos poitrines, en tentant de ne pas esquisser le moindre sourire malgré nos zygomatiques tressaillants. Dans le train, nous nous sommes retrouvés à côté d’un monsieur ventripotent d’un certain âge qui n’arrêtait pas se marrer en regardant nos voisins jouer à la belote. Au bout d’un moment, arriva ce qui devait arriver ; la bouche grande ouverte, il se mit à ronfler bruyamment, interrompant notre discussion ô combien passionnante.

A Gare du Nord, c’est une fois de plus le boxon. Une grève surprise ? Les trains affichés auraient dû partir une heure plus tôt, alors j’avise le premier quai annonçant Pontoise et je m’engouffre dans un train noir de monde. Pas besoin de se tenir aux barres, nous sommes tellement collés qu’on ne risque pas de tomber. Le type qui se trouve dos à moi avait les omoplates en forme de chaudière et alors que je réussissais à ne pas avoir trop chaud, je pouvais le sentir dégager autant de chaleur qu’un réacteur de Tupolev. Finalement, exaspéré par la promiscuité, je me suis planqué dans les soufflets, vous savez, ces gros soufflets en caoutchouc qui séparent les rames. Je me suis mis là pour attendre que le gros du monde finisse par dégager le passage et finalement, je n’avais pas trop chaud, j’étais même bien, j’avais de l’air. J’essayais simplement de ne pas trop penser au fait que si les deux wagons se désolidarisaient, je risquais de fort de partir en roue libre sur les rails. Vue plongeante sur un cou superbe terminant sa course dans un décolleté discret, mais la fille avait le visage aussi luisant qu’un cornet de frite. Dans les escaliers, il y a un type avec un sac à dos, le genre naturaliste ou entomologiste, et dans son sac dépasse une pousse de plantain, une des pires saloperies du règne végétal, qui pousse n’importe où. Un type transpire comme un glaçon au soleil, il est tout maigre mais il a des mains avec des doigts affreux, gros comme des bites.

Les gens descendent, l’air raréfié commence à revenir, je reviens parmi les vivants et les transpirants. Je pensais qu’il faisait trop chaud dans ce train, mais finalement, il fait encore plus chaud dehors. Finalement, j’étais mieux à l’intérieur, dans mon soufflet.

Quoi qu’il en soit, le vide finit toujours par se faire autour de moi.

Grains de café et noyaux de cerises

Un billet après trois jours. Trois jours hors-circuit, trois jours dans ma coquille, accompagné d’O’Hanlon, d’Adolfo Bioy Casares, d’Ella Maillart et de Paul Bowles, trois jours de confusion, à peine vécus, juste survolés.

Samedi à Paris, le quartier étudiant, les travées vertes et les lignes de train abandonnées de la rue Belliard, l’étrange calme du troisième genre de la rue Leibniz, les petites rues sombres et anciennes du quartier latin, la rue Galande, la rue Maître Albert, la rue des Ecoles, des souvenirs d’étudiant qui remontent à la surface. Il faisait beau.

Paris N&B

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Une tourte à l'hirondelle

– Monsieur !! Monsieur !!! Pardon de m’excuser mais je crois que vous avez des crottes dans les cheveux, je me trompe ?
– Oui, vous vous trompez, ce ne sont pas des crottes mais des locks…
– Oops pardon, il m’avait semblé.
– Il vous avait mal semblé.
– Et sinon, qu’est-ce que vous faîtes ?
– Je suis en train de ratisser, sarcler, biner…
– Et sinon, de temps en temps, vous utilisez des mots simples ?
– Non, rarement.
– Oh ! Regardez cette hirondelle qui vole avec une branche dans le bec, elle va faire son nid on dirait !
– Ce n’est pas une hirondelle mais une tourterelle.
– Une tourte à l’hirondelle ? Vous vous moquez, les tourtes ne volent pas.
– Pardon, mais j’ai du travail.
– Moi aussi, et si ça ne vous dérange pas, je vais y aller, j’ai autre chose à faire.

Laurent

Il pleut moins sur le trottoir d'en face

Dix-huit heures et quelques, je sors du boulot, légèrement grisé par une onde étrange, pétrie de mots retenus et de propositions avantageuses. Le temps vire au gris ventre de souris, l’air se charge d’humidité champêtre, je file jusqu’à la bouche de métro où les files d’attente serpentent dans les couloirs en cette veille de renouvellement de carte orange (au fait, lisez bien les écrans, la carte orange va bientôt disparaître au profit de Navigo, chouette non?). J’ai le nez plongé dans mon bouquin et je continue de marcher sur le quai du RER jusqu’au pilier qui me retient tous les jours, un bon gros pilier en béton bien froid couvert d’une peinture couleur pisse délayée. Il me semble que c’est Mylène Farmer qui pousse sa complainte dans les hauts-parleurs de la station, mais à ce moment là, je suis partagé entre Chimo qui m’apprend comment se prémunir des jaguars dans la forêt amazonienne et un bilan partiel et exhaustif d’une journée de travail.

[audio:http://theswedishparrot.com/ftp/Tom%20Waits%20-%20Wrong%20Side%20Of%20The%20Road.mp3]

Dans le train, je m’assois là où il y a de la place, en l’occurrence, face à une quinquagénaire absorbée par la lecture passionnante de son programme de télévision et une femme charmante, a priori jeune, portant des jeans que ma soeur trouverait trop fleuris et un blouson de cuir rouge dont la forte odeur de tanin m’arrive en plein dans les narines. Les lunettes Dolce et Gabana sur la tête et son chemisier largement ouvert sur une poitrine rebondie et hâlée finissent de me convaincre qu’elle n’est finalement pas si jeune que ça. Il y a des signes qui trahissent l’état d’esprit et l’âge dans certaines catégories de population.

En sortant du train, la pluie tombe drue et malgré mes efforts pour passer entre les gouttes, je me retrouve trempé en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. C’est alors que je tente un subterfuge à l’attention de l’eau du ciel. Je regarde la direction du vent et je m’aperçois que si je prends le trottoir de droite, je peux être protégé par les murs des propriétés qui longent la rue Chanzy, mais la rue Chanzy a une fin et je dois encore faire la moitié du trajet exposé en plein vent, pleine pluie. Je ne porte qu’un ticheurte et un pull et très vite, je sens que je vais être imbibé de tous les côtés, la face nord et le pic d’Aneto. L’eau ruisselle sur ma tête, faisant fi des cheveux coupés courts, s’immisçant avec perversité sur mon crâne comme une toile d’araignée et finit par goutter jusque sur mon nez, comme si un rhume sournois était en train de me narguer. Je tente de changer de trottoir, mais sur celui de gauche, il pleut beaucoup plus fort, c’est certain, alors je reste sur celui de droite, protégé du vent. C’est certain, il pleut moins sur ce trottoir.

trottoirPhoto © g@rota

La routine

4 avril 2006, un matin inspiré, un texte reconduit…

Il y a des jours comme ça où on pressent qu’un truc va se passer, que les éléments vont se déchainer pour vous faire des petites blagues qui pourrissent la vie, des petits poissons d’avril à retardement, et finalement, ça arrive bel et bien. C’est ce que j’ai pu constater hier en soir en sortant du boulot. Je descends au parking, met les clefs dans le contact et là, un tour de moteur et puis plus rien.

Du coup, je jette un merde léger et presque amusé. Je regarde au plafond de la voiture et je me rends compte que la loupiote du plafonnier est allumée. C’est bien ma veine ça, alors cette fois-ci je pousse un merde proéminent et sonore, mais je me reprends tout de suite et je me dis bien vite qu’il n’y aucune raison de s’énerver. Continue reading “La routine”

Ironie

Et pour couronner cette journée de merde, en sortant du train ce soir, je me suis pris la flotte sur le coin du nez…
Si ça c’est pas du bol quand même…
Bon, je vais aller me coucher avant qu’il ne m’arrive une autre catastrophe.
Oui, ben quoi, faut bien rigoler un peu quand même. Non ? Non ? Bon.

Bilan de deux mois d'une certaine inactivité

Je trouve ça effrayant. Voici presque deux mois que je n’ai pas ouvert un journal autre qu’un programme de télévision. Deux mois que je n’ai pas regardé le journal télévisé. Deux mois que je n’écoute pas les informations à la radio, que je ne consulte pas les informations sur Internet et que je ne regarde même pas les gros titres des journaux dans les kiosques et même les journaux d’information gratuits distribués dans le métro. Deux mois que je suis à la ramasse totale en ce qui concerne le monde, l’Europe, la France, je suis complètement largué ; j’entends bien parler de choses et d’autres par mes collègues de travail.
De temps en temps Fabienne me glisse une info importante, du genre les affrontements de Gare du Nord (c’est sur ma ligne de train et c’est depuis Genève que j’apprends l’événement) ou alors un massacre dans une école américaine.
Ce n’est pas que je m’en fous, c’est juste que ça ne m’intéresse pas. J’ai vécu toute une période complètement engoncé dans l’information à en avoir des nausées, à décortiquer les canards, à zapper entre les chaînes d’info, à n’écouter que France Info dans ma voiture et aujourd’hui, plus rien.
Croyez-le ou non, ça ne me manque pas et ça fait un bien fou, comme si je m’étais écarté du monde pendant quelques temps, je m’en trouve comme lavé des impuretés du monde, rendu vierge de tous les éléments extérieurs. L’effet sur le moral est saisissant, j’ai comme l’impression d’être entre parenthèses dans ce monde. Et pour le coup, je n’ai aucune envie d’y retourner.
Pour le coup, je me demande quel monstre social je suis devenu. Parfois on me dit “Ohhlalalala (*5), tu as entendu cette histoire ???” et je calme le jeu en disant NON d’emblée, alors on me regarde comme si j’étais atteint d’une forme rare du virus de Marbourg.
Pourtant, je lis énormément, sur tous supports, je regarde parfois d’un oeil distrait la télévision (ce n’est pas pour autant que je l’écoute), j’aime éplucher les pages grand format de CB News, j’agrège plus de 270 fils de news dans mon lecteur RSS dont plus de la moitié est consacrée au design, à l’architecture, aux tendances, au marketing, à la photo, aux voyages, mais rien sur l’actualité. Parfois j’attrape quelques bribes sur tel ou tel blog, mais je saute, “mark all read”, je zappe, je rends les armes. Pas de temps ni de place dans ma vie pour ces choses.
Mais promis, le soir du 22 avril, à 20h00, je serai planté devant ma télé avec un bol de cacahuètes. J’adore lancer des saletés aux singes…*

PS: Message personnel à l’espèce de trou du cul de chauffeur de taxi (vous aurez remarqué le non-emploi particulièrement bien adapté de l’oxymoron dont l’exact opposé s’appelle un pléonasme) qui :

  1. S’est mis sur la file de droite pour tourner à gauche au feu sur le pont d’Asnières.
  2. S’est permis de gueuler parce que j’empruntais la voie la plus à droite et que par conséquent je lui bloquais le passage (il a très certainement dû oublier comme 96% des Français qu’on roule TOUJOURS !!! Bordel !! sur la file la plus à droite).
  3. S’est amusé à me faire une queue de poisson puis s’est pris pour Starsky et Hutchinson (sauf qu’il roulait dans une grosse Mercos baveuse et rutilante) en se mettant en travers de ma route, certainement dans l’espoir que je m’arrêtasse (emploi parfaitement maîtrisé du subjonctif imparfait) pour me laisser défoncer la gueule à coup de cric.
  4. A eu l’air passablement étonné, voire apeuré lorsque j’ai accéléré pour passer la quatrième et le contourner à peine à quelques centimètres d’un coup de volant savamment maîtrisé (la pratique, jeune padawan, la pratique !).
  5. M’a gentiment gratifié d’un appel de phare que je garde planté dans mon coeur telle une épine de Rosa Rugosa, marquant pour l’éternité mon esprit mortifié.

Sache donc, gentil connard, que, malgré le fait que mon coeur a quelques instants battu très fort, j’ai pris un pied fou à te foutre une trouille qui, je le souhaite de toute mon âme, te servira de leçon.
En espérant également que tu aies tâché ton siège…

Sur ces entrefaites, je tire ma révérence, le temps d’une nuit.

* http://www.mangerbouger.fr/

Couleur vent du désert

Il fait bon ce matin. En me levant, derrière les rideaux, je croyais qu’il pleuvait; ce n’était certainement que mon imagination. J’ai beaucoup d’imagination. J’en ai tellement que sous des apparences banales, je suis capable de m’inventer une vie en rêve, et tandis que j’ai – a priori – passé un week-end tout ce qu’il y a de plus normal, simple, banal, il s’est en réalité passé plein de choses. J’ai passé mon temps à rêver, arborant un léger sourire empreint de bonheur. Tout simplement transporté, transcendé, absolument ensorcelé. Aujourd’hui, à peine reposé et des douleurs un peu partout, je me réveille dans un état second, comme si j’avais passé mon temps à faire l’amour… Plus que jamais je me répète des mots qui semblent être taillés pour moi.

Photo © Elisham

Je me souviens d’un texte que j’avais écrit il y a quelques temps dans lequel je faisais part de mes déceptions quant à ce que mon pays devenait. Si je fais le bilan aujourd’hui, je me rends compte qu’en fait, je m’en contrefous. Je m’en contrefous parce que je n’y suis plus. La France est devenu un pays merdeux, quelque chose qui n’a plus rien à voir avec ce qu’il était dans mon enfance, pas plus qu’il ne ressemble à l’image qu’il pourrait avoir. Je repensais à cela ce matin dans le train. Et puis je me suis souvenu d’un texte que j’avais écrit dans mon adolescence dans lequel je disais que je savais d’emblée comment je mourrais, ou plutôt comment j’aimerais mourir. Parce qu’en fait, je m’imagine très bien ne pas mourir ici, je me vois dans quelques années traînant mes guêtres dans les rues sales de Calcutta ou dans un bordel de Singapour, dans les faubourgs désertiques de Windhoek ou sur le Mont Sinaï et à la relecture de Rashômon, je me dis que je n’ai jamais envisagé le monde autrement que sous ses aspects les plus inabordables. Aussi, la France ne signifie t-elle plus rien à mes yeux. Mon pays de naissance ? Oui et alors ? Je n’ai même plus de carte d’identité… Ces contours-là s’effacent et je ne m’en porte pas plus mal. Citoyen du monde ? Je m’en fous… C’est le genre de mots bons pour les people en mal de sensations. Qu’importe si je meurs ici ou ailleurs, qu’importe où seront dispersées mes cendres. Je finirai peut-être vieillard rachitique et barbu, nu comme un sādhu Nanga à la recherche du Nirvana, les yeux ravagés par la déesse Ganja, l’esprit aussi rationnel qu’un bol de compote…

نعيم

J’ai enfilé mon pantalon couleur vent du désert en ortie de Chine et un pull en lin marron, presque prêt à courir le monde. Sur ma figure se dessine la félicité, des traits comme dessinés par les récits qui donnent un beau visage.

Aujourd’hui est un nouveau jour, et tous ceux qui suivront le seront également, peu importe ce qui arrive. Mektoub…

Un 28 mars

Fabienne a les pieds froids, alors je lui dis de prendre un bain de pieds tiède (PAS CHAUD, BORDEL !) avec du gros sel dedans (dans l’eau, pas dans les pieds, il ne s’agit pas d’un court-bouillon).
Elle me dit qu’elle verra gnagna…. Et qu’elle prendra un bain de pied quand je me serais occupé de mon genou. Le truc, c’est que mon genou va très très bien.
Alors le soir venu, elle m’envoie un SMS pour me dire qu’elle est en train de prendre un bain de pieds CHAUD.
PFFFF.
Je lui dis TIEDE !!! Alors je lui demande si elle n’a pas des origines bretonnes, nan parce qu’elle est têtue la bougresse.
Elle me répond qu’elle n’est pas assez Bretonne pour être têtue, à quoi je lui réponds qu’elle est surtout trop Suisse.
Et puis bon, j’étais sur le trône, alors je lui dis.
Et pour ponctuer le tout, je lui envoie une photo de moi en train de lire “Lire aux cabinets” d’Henry Miller. Normal.
Elle me répond vous savez quoi ?
“HAN deux fois dans la journée ? Tu as mangé du chou OU BIEN ?”
Du coup, je me suis bien marré.
Elle aussi.