Le fil de l'horizon, Antonio Tabucchi

Antonio Tabucchi, c’est un peu l’auteur providentiel qu’il faut lire pour voyager et rêver, c’est un auteur splendide et sensuel, malgré l’image froide qu’il donne au premier abord. Lire un livre de Tabucchi est un moment précieux, c’est pour cela que j’ai mis du temps à me décider pour écrire ce billet. Le fil de l’horizon est un petit livre d’une centaine de pages et si le rythme des premières lignes peut laisser un peu sceptique, le peu d’entraînement donner envie de laisser tomber, on se laisse bercer par son écriture poétique et douce, savante et organique. A la lecture de la note s’inscrivant comme une postface[1], on comprend un peu mieux l’ambiance puisque l’auteur avoue lui-même n’avoir pas pris beaucoup de plaisir à écrire ce livre.

GenovaPhoto © Marco Vissani

Nous sommes dans un port, ce n’est pas par hasard. Spino est employé dans une morgue et la présence d’un cadavre anonyme dans ses murs l’intrigue. Comme pour tromper l’ennui, il va décider de découvrir qui est cet homme dont l’identité semble échapper dès qu’on s’en approche. Le fil de l’horizon ce sont ces détails insignifiants auxquels il s’attache pour résoudre cette énigme obsédante.

Il les a regardé dans les yeux avec insistance, comme le font parfois les prêtres. “Pourquoi vous intéressez-vous à lui ?, ” a-t-il demandé.
“Parce qu’il est mort et que je suis vivant”, a répondu Spino.
Il ne sait pas très bien pourquoi il a dit cela, il lui a semblé que c’était la seule réponse plausible, parce qu’en réalité il n’avait aucune réponse.

L’enquête progresse tout doucement, les scènes se succèdent à un rythme auquel Tabucchi m’a habitué, Spino se rapproche certainement de la réalité, mais au bout du compte, tout lui échappe, plus rien n’a de sens, l’enquête policière patine et se transforme en poème. Le fil de l’horizon, ce sont toutes ces vérités futiles ou subtiles que l’on s’évertue à approfondir, mais qui finalement s’envolent dès qu’on les touche du doigt.

Et le voilà qui erre de nouveau à la recherche de rien, les murs de ces ruelles semblent lui promettre une récompense qu’il ne parvient pas à obtenir, comme si elles dessinaient un parcours de jeu de l’oie fait de cases vides et de pièges dans lequel il déambule en espérant que le dé s’arrête bientôt sur un numéro qui résoudra son énigme. Et pendant ce temps, là-bas, il y a la mer qu’il contemple, les bateaux, les mouettes, les nuages.

Un texte magnifique, indispensable, une rêverie sensuelle à la mode italienne.

Notes:

[1] Je me risque à la reproduire ici, mais ce document est un réel plaisir que je souhaite partager.

Le fil de l'¢horizon, Antonio Tabucchi

Bilan de deux mois d'une certaine inactivité

Je trouve ça effrayant. Voici presque deux mois que je n’ai pas ouvert un journal autre qu’un programme de télévision. Deux mois que je n’ai pas regardé le journal télévisé. Deux mois que je n’écoute pas les informations à la radio, que je ne consulte pas les informations sur Internet et que je ne regarde même pas les gros titres des journaux dans les kiosques et même les journaux d’information gratuits distribués dans le métro. Deux mois que je suis à la ramasse totale en ce qui concerne le monde, l’Europe, la France, je suis complètement largué ; j’entends bien parler de choses et d’autres par mes collègues de travail.
De temps en temps Fabienne me glisse une info importante, du genre les affrontements de Gare du Nord (c’est sur ma ligne de train et c’est depuis Genève que j’apprends l’événement) ou alors un massacre dans une école américaine.
Ce n’est pas que je m’en fous, c’est juste que ça ne m’intéresse pas. J’ai vécu toute une période complètement engoncé dans l’information à en avoir des nausées, à décortiquer les canards, à zapper entre les chaînes d’info, à n’écouter que France Info dans ma voiture et aujourd’hui, plus rien.
Croyez-le ou non, ça ne me manque pas et ça fait un bien fou, comme si je m’étais écarté du monde pendant quelques temps, je m’en trouve comme lavé des impuretés du monde, rendu vierge de tous les éléments extérieurs. L’effet sur le moral est saisissant, j’ai comme l’impression d’être entre parenthèses dans ce monde. Et pour le coup, je n’ai aucune envie d’y retourner.
Pour le coup, je me demande quel monstre social je suis devenu. Parfois on me dit “Ohhlalalala (*5), tu as entendu cette histoire ???” et je calme le jeu en disant NON d’emblée, alors on me regarde comme si j’étais atteint d’une forme rare du virus de Marbourg.
Pourtant, je lis énormément, sur tous supports, je regarde parfois d’un oeil distrait la télévision (ce n’est pas pour autant que je l’écoute), j’aime éplucher les pages grand format de CB News, j’agrège plus de 270 fils de news dans mon lecteur RSS dont plus de la moitié est consacrée au design, à l’architecture, aux tendances, au marketing, à la photo, aux voyages, mais rien sur l’actualité. Parfois j’attrape quelques bribes sur tel ou tel blog, mais je saute, “mark all read”, je zappe, je rends les armes. Pas de temps ni de place dans ma vie pour ces choses.
Mais promis, le soir du 22 avril, à 20h00, je serai planté devant ma télé avec un bol de cacahuètes. J’adore lancer des saletés aux singes…*

PS: Message personnel à l’espèce de trou du cul de chauffeur de taxi (vous aurez remarqué le non-emploi particulièrement bien adapté de l’oxymoron dont l’exact opposé s’appelle un pléonasme) qui :

  1. S’est mis sur la file de droite pour tourner à gauche au feu sur le pont d’Asnières.
  2. S’est permis de gueuler parce que j’empruntais la voie la plus à droite et que par conséquent je lui bloquais le passage (il a très certainement dû oublier comme 96% des Français qu’on roule TOUJOURS !!! Bordel !! sur la file la plus à droite).
  3. S’est amusé à me faire une queue de poisson puis s’est pris pour Starsky et Hutchinson (sauf qu’il roulait dans une grosse Mercos baveuse et rutilante) en se mettant en travers de ma route, certainement dans l’espoir que je m’arrêtasse (emploi parfaitement maîtrisé du subjonctif imparfait) pour me laisser défoncer la gueule à coup de cric.
  4. A eu l’air passablement étonné, voire apeuré lorsque j’ai accéléré pour passer la quatrième et le contourner à peine à quelques centimètres d’un coup de volant savamment maîtrisé (la pratique, jeune padawan, la pratique !).
  5. M’a gentiment gratifié d’un appel de phare que je garde planté dans mon coeur telle une épine de Rosa Rugosa, marquant pour l’éternité mon esprit mortifié.

Sache donc, gentil connard, que, malgré le fait que mon coeur a quelques instants battu très fort, j’ai pris un pied fou à te foutre une trouille qui, je le souhaite de toute mon âme, te servira de leçon.
En espérant également que tu aies tâché ton siège…

Sur ces entrefaites, je tire ma révérence, le temps d’une nuit.

* http://www.mangerbouger.fr/

Un 4 avril

Ma journée n’a pas été particulièrement bonne – même si elle n’a pas été foncièrement mauvaise – disons simplement que si je fais le compte de tout de ce qui a été bon – je ne trouve rien – en revanche si je fais le compte de tout ce qui me pèse – la balance commence à pencher du mauvais côté – un adjectif me vient à l’esprit – géostationnaire – c’est ça – nulle part – en suspens – comme entre parenthèses – avec une capacité incroyable à m’imprégner du malheur des autres comme une éponge – il faut que je sorte – que je m’aère – je m’ennuie – besoin de mer – voyages – soleil – les gens autour – la foule qui danse – je tourne en rond – je préfère me taire.

Pulse

Loin d’être calme, je vis chaque moment à toute vitesse, la tête en ébullition… Je n’arrive pas à me concentrer, je carbure au café quinze heures par jour, je commence à m’organiser dans tous les sens, je classe mes affaires, je repère où chaque chose se trouve et je me construis des espaces de rangement strictement virtuels.

En fait, je lis beaucoup de choses, à droite et à gauche, je fais ce qu’il ne faut pas faire, je compare mon écriture à ce qu’ont fait les autres avant moi. Je suis seul dans ce que je fais, je n’ai personne pour me seconder, pas de secrétaire, pas de nègre, je suis tout seul avec mon clavier, mes carnets et mes stylos… Je me rends compte au fur et à mesure que je trouve moi-même les réponses à mes questions sur le fait d’écrire en lisant et relisant ce que j’ai fait dans chacun de mes univers. J’y vois des imbrications, un immense jeu de lego qui se met en place. Et j’adore ça, je suis incroyablement excité (je sais, c’est un peu tout le temps) et je commence à avoir de l’espoir. J’entrevois clairement la possibilité d’écrire plus, mieux, de manière quasiment militaire, et je le fais.

[audio:http://theswedishparrot.com/ftp/02%20-%20Before%20You%20Leave.mp3]

Tu sens les pulsations ? Tu sens comme ça bouge ? Hmmm… Je ne compte plus les fois où je me suis lamenté sur ma paresse et mon manque de volonté, mais tout ça semble être du passé, depuis quelques temps déjà. Je me sens comme un adolescent au purgatoire… Mêmes émois… Aujourd’hui, il est temps de se mettre en route, à l’ancienne, comme au temps où l’on partait sur les routes désertiques avec une grande bagnole avec une seule banquette à l’avant… Un parfum de désert, une traversée des grands espaces que je ne pensais plus possible…

C’est certain qu’Amiens n’est pas le désert, quoique c’est une ville en plein milieu des champs. J’aime me lancer sur cette autoroute A16, alors que le soir est tombé, que le brouillard fin enveloppe la campagne. La vitesse est grisante, il n’y a pas grand monde; je colle mes mains sur le volant, je m’enfonce dans mon siège et j’écrase le champignon pour faire des accélérations spectaculaires qui ne font rire que moi. Le moment de folie passé, je roule tranquillement en regardant l’horizon, en m’imaginant au volant d’une Chevrolet Impala sillonnant le routes de l’Iowa, mais bien vite, je vois des champs de betteraves à perte de vue et je suis au volant d’une 206 qui sent encore l’usine.

Et c’est soudain; c’est le drame. J’ai dû pêcher dans une autre vie, faire beaucoup de mal à des gens très bien, tuer des animaux. Bref, mauvais karma.

Je n’ai même pas parlé des livres que j’ai lu ces derniers temps, ce documentaire bouleversant de John Hersey sur Hiroshima, ce livre divertissant et parfois rude d’Augusten Burroughs, Courir avec des ciseaux, et tous ceux que j’ai entâmé ou entassé sur la tablette qui me sert de table de chevet. J’avais envie de passer à autre chose. Tout à coup, Kerouac, Bukowski, les auteurs japonais, John Fante, mes livres d’architecture, Henry Miller (c’est très californien tout ça), tous ceux qui m’accompagnent d’ordinaire m’ont paru dramatique, trop peu en phase avec la légèreté dont j’avais besoin ces derniers temps. Alors j’ai fait quelque chose que je ne croyais plus possible depuis bien longtemps; lire une oeuvre du XVIIè siècle d’un ecclésiastique britannique. Présentées comme ça, les choses manquent de piquant, c’est certain. J’avais essayé de me plonger dans une matinée d’amour pur de Yukio Mishima (ce nom résonne avec une certaine poésie à mes oreilles, plus que son vrai nom, Kimitake Hiraoka), mais les nouvelles m’ennuient pour le moment. C’est donc avec une certaine joie que je me suis permis de reprendre une lecture qui devait dater d’au moins sept ou huit ans : The Life and Opinions of Tristram Shandy, Gentleman de Laurence Sterne, volume 1. C’est un texte étonnant, mais j’en ai encore lu trop peu pour pouvoir disserter dessus. La moitié du livre est consacré aux notes de Guy Jouvet, traducteur génialissime qui a su respecter les caprices typographiques de l’auteur. J’aime ces livres savants qui digressent à l’infini et finissent par nous emporter dans un labyrinthe sans fin de connaissances, un peu à la manière des écrits conjoints de Gilles Deleuze et Felix Guattari. Par exemple, j’ai appris hier soir qu’il existait, selon Ambroise Paré, trois niveaux corporels des esprits, mais évidemment, l’intérêt universel de la chose sur ce blog reste somme toute assez limité. Cette lecture est incroyable, impertinente, drôle, terriblement érudite, annotée de citations de Montaigne, La Bruyère et dirigée par les opinions mêmes du traducteur / commentateur.

Il faudrait aussi se replonger dans un livre que j’ai dévoré autrefois pendant mes études, Principes fondamentaux de l’histoire de l’art : Le problème de l’évolution du style dans l’art moderne de Heinrich Wölfflin. Alors oui, ça parait pédant de placer ça dans une conversation entre le fromage et le dessert, ou alors (et attention, c’est du vécu) au square en rencontrant un couple autrefois ami, poussette et chien en laisse à la clef (Elle dit: je suis désolée, je ne vous invite pas à manger en ce moment, on est plein dans les cartons. Ce que à quoi j’ai répondu intérieurement: “Merci de tout coeur !” Elle reprend: “Mais on peut toujours aller se faire une balade au parc ?” et moi de penser “C’est ça ouais, compte là-dessus, plutôt crever d’une chaude-pisse”), mais au bout du compte, ce livre est très facile à lire et apprend les différences fondamentales entre le style classique et le baroque, dans la courte évolution qui a fait basculer l’un dans l’autre. Non ? Toujours pas convaincu ? Alors on y comprend mieux comment Titien (Bon dieu, il s’appelle Tiziano Vecceli non ? On ne peut pas lui foutre la paix en l’appelant par son vrai nom ?) a révolutionné l’art en son temps. Je n’essaie pas de vous convaincre, je parle en l’air, c’est tout. Et puis lisez aussi Elie Faure et Ernst Gombrich, ça ne peut que faire du bien…

Euh… J’ai parlé du livre de Régis Debray (pauvre homme affublé d’un prénom aussi ridicule, que Dieu pardonne ses parents) Vie et mort de l’¢image. Une histoire du regard en Occident ? Non alors j’en touche deux mots. Ce livre est en fait sa thèse de doctorat, dirigée par François Dagognet, celui-là même qui a fait sa carrière sur les détritus et les sécrétions corporelles (comprenne qui pourra). Et… c’est tout. On ne badine pas avec les grandes oeuvres – avec l’amour non plus.

J’aurais aimé… être… architecte. J’aurais pu si j’avais travaillé.
J’aurais aimé… être… journaliste. Je n’ai jamais essayé.
Et si finalement je devenais écrivain? (dis-je en pouffant).

Ce ne sont pas les choses elles-mêmes qui tourmentent les hommes, mais les opinions qu’ils forment sur les choses.
Epictète, Encheiridion

J’ai une mémoire prodigieuse pour certaines choses, c’est déjà ça non ? Comme chacune des notes de la Marche Funèbre pour la Reine Mary, d’Henry Purcell… – je suis incapable de me souvenir de ce que j’ai fait hier, mais la partition, ça oui, c’est comme si elle était imprimée sur ma rétine – Montez le son, et je vous demande un peu de recueillement pour cette pauvre Mary qui repose par six pieds sous la terre d’Albion – on parle bien de la Reine d’Angleterre, pas du RMS, le paquebot, on est d’accord ?

[audio:http://theswedishparrot.com/ftp/Purcell.mp3]

Queen Mary

Comme pour faire contraste avec le superbe portrait de Mary, je pense tout à coup à la grossièreté, dans ce qu’elle a de plus global. A ces mots que je prononce parfois au grand désespoir des gens que je côtoie, à ces textes que je me refuse de censurer parce qu’ils sont ce qu’ils doivent être au moment où je les écris, à toutes ces choses que la morale réprouve. Il me semble qu’on peut tout à fait se gratter les couilles en public, le tout étant de le faire avec élégance. La grossièreté ne trouve de sens que si elle est accompagné de son corrélaire, l’élégance. En disant cela, je pense à la dernière publicité Chanel, pour un rouge à lèvre. On y voit une blonde qui est à mon sens censée représenter le désir, la chair, l’envie, mais le problème c’est que cette poupée donne l’effet totalement opposé. Elle est d’un vulgaire affligeant, on croirait voir un pute fraichement débarquée d’Ukraine, tout ce qu’il y a de plus vulgaire et de repoussant chez la pétasse de luxe. Alors oui, je préfère me gratter les couilles en public avec mon charme habituel plutôt que de subir les charmes éventés d’une catin du port de Hambourg essayant de provoquer en moi des émois sexuels en trémoussant son cul enturbanné avec des lèvres qui me rappellent une danseuse de peep-show dans une rue commerçante de Copenhague (les voyages forment la jeunesse parait-il). Où se trouve la grossièreté ? Dans les mots de Bukowski ou dans les images surfaites d’une publicité pour un rouge à lèvres ? Ou encore dans les mots de cette épitaphe qui ornera ma tombe ?…

Je vous emmerde… Et vous me le rendez bien.

Ceci ne s’adresse pas forcément qu’aux lecteurs du Parisien (bon dieu que ce journal est minable, l’expression même de la vulgarité – encore – d’un certain lectorat)… Je suis de retour, c’est indiscutable (pas de fausse modestie), avec mes stylos Pilot Tech-Point V7, mon envie de crustacés, mes mains et mes doigts dans lesquels on peut voir, selon la lumière, soit la main câleuse du scribe ou la main délicate de l’intellectuel – merde, ce ne sont que des mains après tout – et puis mon irrésistible envie d’être tout pour quelqu’un. Dans ma réclusion, je souffre de la solitude de celui qui désormais ne va faire qu’attendre. Et Dieu sait que je peux être patient pour ce genre de chose, même si ça me ronge les chairs.

[audio:http://theswedishparrot.com/ftp/Bee%20Gees%20-%20Saturday%20Night%20Fever%20-%20Disco%20Inferno.mp3]

Je vais ressortir mes pinceaux, mes carnets et je vais me remettre à peindre avec cette technique si particulière qui consiste à peindre avec du thé. Avec ce soleil, quelques idées en tête, je rêve de navires et de marées lointaines…

Repartir vers le large…

Californie mystique

Michael Rauner est parti faire le tour des lieux mystiques de la Californie dans une sorte de voyage ésotérique, révélant ainsi l’âme d’un des Etats d’Amérique les plus fantasmatiques qui soit dans une démarche quasi ethnographique. Un travail surprenant, haut en couleurs et une vision éclairée sur le sujet qui a donné naissance à un livre écrit par Erik Davis: The Visionary State: A journey through California’s spiritual landscape.

Visionary State

A voir aussi sur le site du Center for Land Use Interpretation, l’incroyable base de données sur le paysage des états (The Center for Land Use Interpretation’s Land Use Database) et l’American Land Museum.

Grand Corps Salade

Alors lui !! Alors lui ! Bon Dieu qu’il m’énerve. Attends, je te fais un slam…
Avec sa dégaine de loulou des banlieues, sa voix grave très légèrement poussée, à peine, et sa béquille qui boite, il représente à mes yeux tout ce que la machine commerciale peut commettre de pire. Sous couvert de poésie – déjà que la poésie me fatigue mais alors là, c’est puissance 10 – il ne fait qu’écrire des textes sombres et sans saveur. Attends, je te fais un slam…
Et moi qui croyait que sa béquille, il l’avait attrapé dans une bataille rangée de loulous des banlieues, un coup de surin parti tout seul ou une balle perdue, non non. Monsieur s’est raclé sur le béton à la piscine municipale. Attends, je te fais un slam…
C’est ballot, hein ? Je suis désolé, mais je ne peux pas. Le slam c’est rien, c’est moche, c’est triste à mourir ou à chialer, c’est pas de l’art, c’est du vent passé à la moulinette Universal et surtout, c’est très tendance. Côté chanson française, on encense, on congratule, mais que la chanson française fasse déjà le ménage dans ses rangs! Attends, je te fais un slam…
Voilà, c’est mode, c’est monotone et ça plait aux bobos. Au moins les bobos servent à quelque chose, ils écoutent tout ce qu’il y a de plus merdique dans les bacs, ça évite de se tromper. Grand Corps Salade, attends, je te fais un slam…

Les histoires d’amour, c’est comme les voyages en train
Et quand je vois tous ces voyageurs, parfois j’aimerais en être un
Pourquoi tu crois que tant de gens attendent sur le quai de la gare
Pourquoi tu crois qu’on flippe autant d’arriver en retard

Voilà, je t’ai fait un slam, désolé mais il est midi vingt et je dois aller acheter une salade, et puis des brocolis pendant que j’y suis (oh, ça rime!)

Une belle journée

Lorsque vous lirez ce billet, je serai déjà loin. Je passe la journée dans la Somme, à quelques deux cents kilomètres de Paris, si toutefois j’arrive jusque là puisqu’il est prévu de la neige. Comble du raffinement, je me fais conduire dans une voiture confortable accompagné de deux filles, ayant ainsi la possibilité d’admirer à loisir ce paysage de plaines monotones qui pourtant m’attire tant. Les paysages du Nord provoquent toujours des sourires de condescendance, presque de pitié, mais tout dépend de la façon dont on les regarde, car il ne suffit pas d’avoir des yeux pour voir, il faut aussi ressentir le monde. Je conduis souvent et j’ai rarement l’opportunité de faire le touriste ; je me promets à moi-même d’en profiter au maximum. Les voyages en train, je les aime tout autant, mais derrière les vitres sales des wagons, on voit les paysages sous une forme qui ne leur convient guère.

Il fait froid, humide, tandis que les quelques minces flocons tombés ce matin ont déjà fondu, ne laissant rien d’autre sur le bitume qu’une pellicule flasque. Je suis sorti pour m’enquérir de l’état de santé de ma voiture qui se refait une cure de jouvence chez le mécanicien ; rassurez-vous, elle semble aller bien.

Je suis prêt, mon caban est sur la chaise, prêt à être enfilé, ma besace elle aussi est fermée. Je n’ai plus qu’à chausser mes lunettes et à attendre qu’on m’appelle pour partir.

Je n’ai rien d’autre à dire, si ce n’est qu’une étrange paix intérieure m’anime, les yeux tombants et la gorge sèche. Pour l’instant, tout va bien, je suis heureux, je suis bien.

Goharshad

Goharshad

Au fil de mes recherches récentes, j’ai emprunté à la bibliothèque Photographies et carnets de voyage de Bruce Chatwin, par David King et Francis Wyndham.

Mis à part de très beaux textes extraits des Moleskine de Bruce Chatwin sur ses Voyages en Mauritanie et en Afghanistan, entre autres on découvre de magnifiques photos des quatre coins du monde (Chatwin, ex-expert en art chez Sotheby’s, à la fois écrivain et photographe esthète) n’illustrant pas du tout le texte mais donnant à voir la vision du monde d’un personnage hors-norme de la littérature. On découvre des clichés d’une rigueur extrême. Armé de son Leica, on le découvre jaloux de ses photos, ne sortant son appareil que lorsqu’il se trouvait seul, shootant des portes et des toits de tôles ondulées, composant des clichés à la composition stricte, aux couleurs vives, témoins d’une époque ou d’une particularité régionale.

Au milieu de ce joyeux fatras jouissif, se trouve une photo qui a attiré mon attention. Il s’agit d’un toit de mausolée, passablement détruit. Il se trouve en fait que c’est le Mausolée de Gohar Shad, un chef d’oeuvre d’architecture musulmane datant du XVè siècle et d’une sobriété sans égale. Pas très loin de là se trouve également la grande mosquée, visible de loin avec son magnifique dôme bleu et ses dorures. Un sommet de l’abstraction en art, des couleurs chatoyantes, qui se passent de commentaires.

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Ray Harryhausen, le magicien

Ce nom ne vous dit peut-être rien, mais vous connaissez forcément son oeuvre, ou tout au moins son travail. Si comme moi vous avez vu dans votre jeunesse des vieux films Hollywoodiens comme Jason et les Argonautes, Le choc des titans ou Le 7ème voyage de Sindbad, vous vous souvenez certainement de ces effets spéciaux terrifiants. Des armées de squelettes en déroute, un cyclope géant et unicorne, un danseuse à queue de serpent, autant d’animations qui ont hantés mes nuits d’enfants et me laissent des souvenirs impérissables. Ray Harryhausen est un des maîtres du cinéma fantastique et grâce à ses techniques d’animation image par image, il a influencé les plus grands spécialistes des effets spéciaux d’aujourd’hui. Une oeuvre à redécouvrir.

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Ray Harryhausen