Un homme qui dort

Tu te lèves le matin avec la tête dans le pâté en te demandant si ce n’est pas ce genre de journée où tu ferais mieux de rester couché parce que décidément une bonne journée ne peut pas commencer avec un léger mal de crâne et l’impression qu’on ne va jamais émerger, mais finalement, tout est calme, il fait beau temps, le vent ne souffle pas, et aucun nuage ne vient encombrer l’horizon, et puis tu te sens reposé, la nuit précédente nuit sans sommeil gommée d’un coup d’un seul, pfiout, partie, envolée, ça va bien, tu te regardes dans le miroir pour une fois, et tu regardes ta peau que tu viens de raser, une peau lisse, agréable au toucher et puis tu ne te trouves pas trop mal dans le reflet, c’est tout toi, charmant et calme, il faut bien l’avouer, les tourments de côté, pour une fois, on peut bien se permettre ça de temps en temps, et oh surprise, tu as de l’argent sur ton compte, alors ouf, ouais, ça, ça fait du bien, c’est pas si souvent, la voix de Tamara dans les oreilles, tu vas rendre un livre à la bibliothèque et malgré le fait que tu aies trois bonnes semaines de retard parce que tu l’avais oublié sur ta table de nuit, la bibliothécaire ne dit rien, elle peut te passer ça pour cette fois, et puis elle est contente que tu fasses amende honorable, bonne attitude, et en passant, tu rends son sourire à Claire qui enregistre les livres d’un air désinvolte, et puis tu reprends ta voiture – tu te rendras compte plus tard que tu as oublié de passer au garage pour prendre ton bouchon d’huile, mais c’est pas bien grave – et tu prends des photos, one shot, ça va tout seul, tu es à l’affût, prêt à dégainer, les photos se prennent toutes seules, des photos que tu n’auras pas besoin de retoucher, sur la route, ta tête est vide, tu ne penses à rien, tes emmerdes de côté, une mise entre parenthèses passagère histoire de reprendre ton souffle et tu passes quelques minutes à tenter de reconstruire savamment le souvenir de celle qui t’a fait croire que tu pourrais un jour être heureux, et tout s’effondre comme un château de sable renversé par les flots, alors oui, bien sûr, tu n’en mourras pas, on ne meurt pas de ces choses là, mais quand même, tu traînes avec toi un sacré bagage et tu te dis que tu n’as pas de bol, en fait non, tu te dis que tu vas en souffrir pendant pas mal de temps, parce que ces choses que tu n’as pas vécues, tu les traîneras avec toi toute ta vie en sachant que tu es passé à côté, et ça fera mal autant que ça t’a fait mal le premier jour, tu vas morfler mon gars, cette souffrance là, tu vas la porter vissée sur ta gueule pendant pas mal de temps, et puis tu te demandes si tu ne l’as pas cherché, si ce n’est pas toi qui as provoqué la tempête, et les minutes passent sur l’autoroute, tu t’engouffres sous terre, tu vas errer dans les rayons d’une libraire et tu vas craquer pour un livre rare d’Anne-Marie Schwarzenbach, un autre de Nicolas Bouvier et pourquoi pas quelque chose d’un peu plus anglais, plus léger, qu’en sais-tu, tu vas regarder les maillots de bain, mais rien ne te plait, alors tu vas acheter de la bouffe à emporter pour croquer un morceau assis à l’ombre sur l’esplanade, caché derrière tes lunettes noires, un souffle frais venant de temps en temps de la gauche, un courant d’air frais sur la droite, tu te laisserais bien aller à piquer un roupillon sur les dalles de béton, et tu te fous un peu de l’heure qu’il est parce qu’après tout, ça fait bien cinq jours que tu bosses sur le même bilan, dix-huit tableaux croisés remplis de chiffres que tu ne comprends même plus tellement tu as eu les yeux rivés dessus et tu te demandes où se trouve la faille, à quel moment tu as merdé, et tu n’en as pas dormi parce que tu demandais à quel moment tu allais bien pouvoir t’en sortir et passer à autre chose, alors tu ne regardes pas l’heure et tu profites de l’air ambiant, simple et naturel, tu te demandes pourquoi tout te semble si beau et que tu te sens si bien, mais surtout tu évites de te laisser bercer parce que tu te demandes à quel moment ça va basculer et pourquoi ça va finir par mal se passer… Tu te poses la question, jusqu’au moment où tu t’endormiras, au terme d’une journée bien remplie.

Photo © Ptrob59

4 ans et des poussières d'étoile

Cette année, pour fêter les 4 ans de mon blog, des feux d’artifice ont été tirés un peu partout en France les 13 et 14 juillet derniers. Malheureusement, étant peu en forme et fatigué, je n’ai pas réussi de très bonnes images, contrairement à l’année dernière. J’ai tout de même réussi à en extirper une pas trop mal.

Ici, mon tout premier billet, le 14 juillet 2003.

13 juillet

13 juilletFeu d’artifice tiré pour le 3ème anniversaire de mon blog

Rub' al Khali, la Zone vide

Rub’ al KhaliPhoto © skorpio7272

Les déserts ont ceci de surprenant qu’ils sont des lieux vides dont l’attrait qu’ils exercent sur les sentiments humains ne peut être expliqué que par cette possibilité que l’on a de se retrouver livré à soi-même au milieu de nulle part. Les repères s’effacent et l’apparente vacuité révèle en fait un indiscernable réseau de pistes, telles que Bruce Chatwin les a inventoriées. Rub’ al Khali porte bien son nom, la Zone Vide, une des plus grandes étendues de sable au monde, grande comme la France et le Benelux réunis, coincée entre le sud de l’Arabie Saoudite, le Yémen et le sultanat d’Oman. Même les populations bédouines n’en connaissent que les contours, n’osant pénétrer cet enfer de sable dont les températures frôlent les 55°C en plein été et dont le terrain est parcouru de dunes de plus de trois cents mètres de haut.

Celui qui a fait découvrir ce désert au monde entier, c’est Wilfred Thesiger, un explorateur britannique décédé en 2003 et ces quelques mots, extraits de son livre Arabian Sands, en disent long sur l’attrait de la Zone Vide et cet étrange balance entre le plein et le vide.

For years the Empty Quarter has represented to me the final, unattainable challenge which the desert offered. […] Now I had crossed it. To others my journey would have little importance. It would produce nothing except a rather inaccurate map which no one was ever likely to use. It was a personal experience, and the reward had been a drink of clean, nearly tasteless water. I was content with that.

(Pendant des années, la Zone Vide a représenté pour moi le challenge final et inatteignable que le désert pouvait offrir. […] A présent, je l’ai traversée. Aux yeux des autres, mon voyage peut sembler insignifiant. Il n’est sans doute rien d’autre qu’une carte imprécise que personne ne pourrait utiliser. C’était une expérience personnelle, et la récompense en a été un verre d’eau claire presque sans goût. Cela me suffisait.)

Liens:

Fabienne et moi avons décidé de vous emmener dans un tour du monde virtuel. Vous pouvez suivre les étapes de ce voyage sur Google Maps (c’est magique !)…

Ladybug

La coccinelle est parait-il appelée bête à bon Dieu – erk – parce que soi-disant elle porte bonheur. Voilà *. Toutefois, si Dieu est aussi retors que cette coccinelle-ci, ça ne m’étonne pas que le monde tourne aussi mal. Enfin, je dis ça mais je m’en fous.

* J’adore ce genre d’incohérence qui allie croyances populaires, superstitions et religion, m’enfin bon, on n’est plus à une incohérence près, hein ?

Dans la tempête

Cordages

Nasr Eddin est pris un jour dans une tempête. La coque du navire est terriblement secouée, d’énormes paquets de mer déferlent sur le pont, et même l’équipage n’en mène pas large.
– Arrimez les voiles, hurle le capitaine.
Les marins s’élancent dans les mâts pour y fixer la voilure.
– Quel ordre stupide ! proteste Nasr Eddin. Tu ne vois pas que c’est la coque qui bouge et que c’est elle qu’il faut attacher !

Sublimes paroles et idioties
Nasr Eddin Hodja

Bougie solitaire

Il n’y a pas si longtemps que ça, j’ai vu une émission (tard le jeudi soir sur Arte, pour ne pas la citer) dans laquelle une espèce de grand escogriffe désinvolte évoluait appareil photo à la main et shootait à la volée dans une boîte de nuit à l’ambiance surchauffée, dans laquelle dansaient des filles à poil et des zombies déchirés aux acides. Comme je n’écoute toujours la télévision que d’une oreille inattentive, l’autre oreille perdue dans un bouquin ou sur un magazine, je n’ai pas vraiment suivi, mais il semblait qu’il était journaliste pour un magazine underground et il dissertait joyeusement, les yeux papillonnants dans le vide tandis qu’il sirotait un cocktail, sur la superficialité du monde et des relations qu’entretenaient les gens dans les milieux mondains ou branchés. Bref, rien de tellement passionnant.

Et en fait, je voulais dire un truc super intéressant, et à force de m’interroger, je m’emmêle les pinceaux, mais c’est pas grave, ce sera pour un autre jour.

Tiens, j’y pense, organe n’est ni plus ni moins que l’anagramme d’orange.

Oui je sais, j’ai tronqué mon billet, mais il est plus joli comme ça.

Port de Saint-Trojan

Peau orange et purée de carottes

Je voulais mettre une photo de moi, ma trombine mal rasée, avec mon ticheurte orange, mais finalement, j’ai préféré mettre une photo de la pâtisserie que je me suis payé avec un plaisir immense. Malheureusement, malgré le prestige mondial dont jouit (hmmm) Sadaharu Aoki, ses créations sont plus jolies qu’elles ne sont bonnes.
C’est tout ? Oui. C’est tout, il faudra bien vous en satisfaire. Ah j’oubliais ! Ceci n’est pas un billet sans musique. Oui, ça surprend. J’ai pas tout le temps des trucs intéressants à dire.

[audio:http://theswedishparrot.com/ftp/Freeformfive.mp3]

Sadaharu Aoki
Pour ceux que ça intéresse, cette voix sublime est celle de Tamara Barnett-Herrin.

Courrier de nulle part…

Mine de rien, il y a plus d’une semaine que je n’ai rien écrit alors que je ne suis même pas en vacances.
En fait, si.
J’ai écrit plein de choses, je me suis presque brûlé les doigts sur le clavier comme pour exorciser une douleur dont je ne connaissais pas l’intensité, je me suis vengé par les mots, vengé de quoi ? Je ne sais pas, je n’en veux à personne en particulier, si ce n’est à moi-même; tendre vers la disparition comme une solution au mal-être. Alors j’ai tout effacé.

[audio:http://theswedishparrot.com/ftp/DeadAlready.mp3]

Bon.
Voilà.
Je vois mes billets qui s’espacent, le temps qui défile, la passion qui se délite, la curiosité en faillite, l’impression que tout ceci n’a pas de cohérence, le regard perdu sur des cartes desquelles les îles auraient disparu… Un rêve qui s’enfuit.

Et puis l’ellipse qui ne me va pas…
La vision d’un monde rempli par le chaos…
Des jours harassants derrière moi… La vie devant… Soudain le calme…

La suite ? Je ne sais pas, je verrai au coup par coup. Je ne sais même pas s’il y en aura une. Et puis là, de toute façon, ça m’est complètement égal. Désolé.

oleron-036