La Shoah et la danse

– En ce moment, je lis Primo Levi.
– Ah ouais…
– …
– Lequel ? Si c’est un homme ?
– Ouais.
– Ah ouais, quand même, c’est pas vraiment léger comme littérature…
– En même temps quand tu lis un livre qui  traite de la Shoah, c’est difficile de faire des claquettes…

Just hear it

Pour ceux que Deezer exaspère avec ses couleurs vives, ses images qui n’arrêtent pas de bouger et surtout ceux qui n’arrivent pas à s’y retrouver dans un système de navigation aussi capricieux qu’incompréhensible, voici un petit nouveau encore en version bêta.
Un look sobre sur fond noir, une simplicité d’utilisation enfantine et des listes de titres passablement bien fournies en font un bon concurrent de l’autre. Pour l’instant encore sans publicité. Développée apparemment en Flex, l’application a toutefois quelques soucis avec Firefox.
Justhearit. Un lieu où on se sent bien.

justheartit

Plein d’autres applications listées ici.

Libfly

A cause de l’ami Rasbaille (je dis bien à cause, pas grâce, ou alors grâce à lui j’ai passé beaucoup trop de temps sur Internet, oui, ça ne tient pas), je suis tombé dans Libfly, un site qui fait étrangement penser à Librarything que j’ai découvert en 2005. Le principe du site est le même puisqu’il permet de cataloguer sa bibliothèque en ligne en recherchant des œuvres parmi un catalogue ou directement par son numéro ISBN (équipé de deux moteurs de recherche, un interne et l’autre connecté sur la base ISBN d’Amazon) , de connaître par ce biais combien de lecteurs ont lu ce même livre, l’ont commenté, noté, etc. Tout ce que permet de faire le web d’aujourd’hui.

libfly

Là où ça devient un peu intéressant, c’est que le site propose l’échange de livres. N’importe lequel de vos livres peut ainsi faire l’objet d’un prêt ou d’un échange avec des gens qui a priori se trouvent à proximité. Là où le système pêche un peu c’est que par curiosité, en cherchant sur la carte si j’avais des voisins, je me suis retrouvé sur une Google Map sur laquelle j’ai vainement tenté de me repérer en finissant par m’apercevoir que j’étais en train de rechercher le Plessis-Bouchard sur la route 85, c’est à dire entre Cupertino et Saratoga, donc en Californie (la vraie, celle de Julien Clerc).
J’étais tout de même assez étonné, et pas peu fier de constater que la plupart des livres que j’ai ajoutés n’existaient pas dans la base de données. Concernant Librarything, ce qui rebute d’entrée de jeu, c’est une organisation digne de la chambre de mon fils et le look d’un site comme on en faisait dans les années 70 (comment ça Internet n’existait pas ?), une navigation pas très intuitive et des listes des livres absolument affreuses à consulter.
Libfly mérite tout de même de connaître plus d’utilisateurs pour, à mon sens, commencer à être intéressant.

De bois et de Russie

Dans un pays qui renie ses origines aux couleurs flamboyantes portées par un Ivan le Terrible colorisé par un Eisenstein inspiré ses maisons de bois ouvragées tombent en lambeaux et s’écoulent inexorablement, un patrimoine qui se perd à moins de finir en bois de chauffage.
De très belles images à ne pas oublier sur English Russia.

russian_wooden_house

Summing the year up

Le dernier jour de l’année, le bon moment pour faire un bilan. Ouais, pourquoi pas. Dernier jour de l’année, c’était une bonne année, elle était meilleure que les précédentes, bien meilleure, même si ce n’était pas encore tout à fait ça. Elle m’a semblé longue cette année-là, s’étirant comme une longue chaussette, désespérément, comme le bas d’une femme qui n’arrête pas de s’étendre…
Je ne regarde même plus en arrière, je ne peux plus. A présent, je regarde déjà l’année prochaine avec tout ce que je dois faire.

  • Chasser mes démons
  • Continuer à écrire ce que j’ai commencé
  • Préparer mon voyage
  • Respirer un bon coup

Ce ne sont même pas des résolutions, ni même des projets, c’est simplement ma petite liste de course.  Pour l’instant, ce soir, c’est le dernier soir de l’année,  l’occasion de l’enterrer une bonne fois pour toute cette satanée année, balayer tous les mauvaises choses pour ne garder que les bons souvenirs et tout ce qu’on a accompli de bon. Ce midi dans le métro, une dame faisait la manche en expliquant son histoire, son mari décédé, ses deux filles à nourrir. J’ai sorti un ticket resto et je lui ai tendu. Elle m’a remercié chaleureusement, n’en croyais pas ses yeux, m’a remercié encore et m’a souhaité un bon réveillon et je lui ai souri, lui ai souhaité bon courage en ne sachant plus que faire tellement j’étais embarrassé. En même temps, le fait d’avoir fait une bonne action m’a sans aucun doute fait du bien aussi, égoïstement, et je me suis demandé pourquoi je ne le faisais pas plus souvent.
Allez, il est temps de partir, bon réveillon à ceux qui passent par là…

rune_guneriussenPhoto © Rune Guneruissen

Les enfants de Timpelbach

Un samedi après-midi froid et sec balayé par le vent du nord, parce qu’il faut bien occuper la chère petite tête blonde qui finit par répéter sans arrêt les mêmes phrases et qui veut même aller au parc alors que dehors il gèle tellement il en a marre de rester enfermé, c’est au cinéma que nous sommes partis, surtout lorsqu’on lui a parlé de ce film dans lequel les enfants sont livrés à eux-mêmes parce que leurs parents n’en peuvent plus de toutes ces bêtises et parce que de manière collective, les adultes se rendent compte qu’il existe dans la petite ville de Timpelbach un réel problème d’autorité avec ces petits morveux.
A l’origine, c’est un roman d’un certain Henry Winterfield, Timpetill – Die Stadt ohne Eltern (La Ville sans parents), un livre écrit à l’origine comme l’a été Le Seigneur des Anneaux, comme un conte à épisodes écrit pour un enfant. Personnellement, ce film m’a fait penser à la Guerre des Boutons, sauf que je n’ai jamais aimé la Guerre des Boutons, peut-être parce que je n’ai jamais aimé Yves Robert et que le roman de Louis Pergaud m’avait franchement barbé.

enfants_timpelbach

Les enfants de Timpelbach c’est avant tout un très beau film, un film avec et sur les enfants, et surtout un très beau film français. En voyant l’affiche, on se dit forcément que c’est encore un film américain, une super-production hollywoodienne créée à grand renfort de dollars et d’effets spéciaux à la Narnia et consorts, mais pas du tout, on est bien dans une belle production française dont on n’a pas à rougir. Mis à part la présence inutile d’un Gérard Depardieu bedonnant dans la peau d’un maréchal certainement russe et d’une Carole Bouquet presque pathétique en bourgeoise fantasque, la seule à tenir le haut du pavé du côté des adultes, c’est Armelle en institutrice aussi cruelle que nunuche.
L’histoire est audacieuse. Après avoir délibéré, les adultes de Timpelbach décident que leurs chères têtes blondes ont dépassé les bornes et qu’il est temps de prendre des mesures, et pour mesure, la plus radicale qui soit va leur être infligée. Les parents simulent un départ irrévocable de la ville, mais prévoient en secret de revenir le soir après une petite partie de campagne. Le problème c’est qu’ils tombent aux mains d’une légion étrangère qui voit ce déplacement massif de population comme une tentative d’invasion et se retrouvent enfermés dans des geôles sombres et humides tandis que leurs enfants sont désormais seuls dans la ville. Avec les plus grands d’entre eux, ils vont s’organiser pour subsister, car il faut bien manger, se laver, continuer à vivre en somme, mais sans les parents. Deux bandes rivales vont s’affronter pour prendre le contrôle de la ville.
Les véritables stars, ce sont les enfants, avec un casting époustouflant de très beaux garnements.

  • Manfred (Raphaël Katz), une sorte de clone d’Harry Potter un peu gaffeur mais très attachant.
  • Marianne (Adèle Exarchopoulos), la rousse sauvageonne, parfaitement troublante dans sa peau androgyne, meneuse d’enfants par défaut, elle est un des pivots de l’histoire.
  • Thomas (Léo Legrand), le beau solitaire enragé, sauvage et repenti, un vrai petit adulte miniature, presque trop beau pour être vrai.
  • Mireille (Lola Creton), la peste par excellence, un physique à la Romane Bohringer, un charme fou…
  • Robert (Léo Paget), l’aristocrate précieux, finalement perspicace et surnommé “le monoclard”.
  • Barnabé (Julien Dubois), le petit muet, frère de Thomas, mignon comme tout avec sa bouille d’ange sans voix.
  • Le reste du casting

Une belle brochette de jeunes acteurs généralement très bons, pour certains au jeu parfois assez inégal ce qui ne fait pas oublier qu’on est au cinéma, mais tous sont certainement très prometteurs.
Finalement, les bons sont vraiment très gentils et les méchants vraiment très méchants, mais à la fin, la morale est sauve, les méchants sont matés parce qu’ils sont allés trop loin, les gentils sont toujours les gentils et les parents apparaissent finalement comme les grands irresponsables dans l’histoire. Incapables d’assumer leur autorité, ils partent et au bout du compte, les enfants s’en sortent très bien tous seuls. Une bonne leçon, pour les parents et pour les spectateurs.
Malgré une fin un peu raplapla, on en arrive presque à oublier qu’on est en train de regarder un film français, qui pour une fois, a réellement frappé un beau coup, avec de surcroit, une photographie superbe et des décors à la hauteur de leurs ambitions.

L'Être Humain

jorn_riel_tb Un don d’écrire avec des mots simples, sans fioritures, une simple faculté à raconter une histoire avec le souffle épique des grandes sagas nordiques. Je connaissais l’écriture rigolarde et fraîche des racontars (skrøner) qui l’ont rendu célèbre, mais pas encore ses récits arctiques. Celui a la douceur d’une neige fraichement tombée.
Un livre lumineux…

« Mais vous ne faites jamais la guerre ? » demanda-t-il.
« Je ne comprends pas ce que tu veux dire », répondit Apuluk. Il répéta le mot que Leiv avait prononcé en islandais. « Ça veut dire quoi, guerre ? »
Leiv réfléchit longuement. Enfin, il dit :
« La guerre, c’est l’absence de paix entre les gens. Certains veulent quelque chose qui appartient aux autres, et alors c’est la guerre. Et les gens continuent à se tuer jusqu’au moment où les plus forts gagnent. »
Narua s’allongea sur le dos et contempla le plafond de la tente.
« On ne connait pas la guerre ici, dit-elle. Mais c’est peut-être parce que nous ne possédons pas beaucoup de choses. Tout ce que nous avons appartient à tout le monde, et on n’a pas la possibilité de vouloir quelque chose qui appartient à quelqu’un d’autre. »
Juste avant de dormir, Leiv murmura :
« Je suis heureux de vivre avec vous. J’ai appris à vivre comme un Être Humain. »

Jørn Riel,
Le garçon qui voulait devenir un être humain,
volume 1, Le Naufrage