Un des plus beaux livres qu’il m’ait été donné de lire ces derniers temps. J’avais déjà lu Conrad il y a quelques temps, mais je n’étais alors peut-être pas assez mûr pour cela. Ce qui est très étrange dans cette nouvelle, c’est le commencement. Marlow est attablé avec d’autres hommes et commence tout de suite à parler, jusqu’à la fin. Il n’y a pas vraiment de justification à ce départ précipité, mais cela donne un souffle épique très intéressant. J’adore les récits d’aventures et celui-ci est une vraie
galère
, mais admirablement racontée, dans un style très pur et concis. Une lecture à enfourcher de suite.
Préface de l’auteur:
« Au coeur des ténèbres » aussi suscita un certain intérêt dès le début, et de ses sources on peut dire au moins ceci : il est bien connu que les curieux vont fureter dans toutes sortes d’endroits (où ils n’ont rien à faire) pour en ressortir avec toute sorte de butin. Cette histoire et une autre qui ne se trouve pas dans ce volume constituent tout le butin que j’ai rapporté du centre de l’Afrique, où vraiment, je n’avais rien à faire.
Et on pompait toujours. Pas de changement de temps. La mer était blanche comme une nappe d’écume, comme un chaudron de lait en ébullition. Pas une échancrure dans les nuages, pas une seule âme même de la taille d’une main, ne fût-ce que pendant dix secondes. Il n’y avait pas de ciel pour nous, il n’y avait pas d’étoiles pour nous, ni soleil ni univers, rien que des nuages rageurs et une mer en furie.