Un samedi après-midi froid et sec balayé par le vent du nord, parce qu’il faut bien occuper la chère petite tête blonde qui finit par répéter sans arrêt les mêmes phrases et qui veut même aller au parc alors que dehors il gèle tellement il en a marre de rester enfermé, c’est au cinéma que nous sommes partis, surtout lorsqu’on lui a parlé de ce film dans lequel les enfants sont livrés à eux-mêmes parce que leurs parents n’en peuvent plus de toutes ces bêtises et parce que de manière collective, les adultes se rendent compte qu’il existe dans la petite ville de Timpelbach un réel problème d’autorité avec ces petits morveux.
A l’origine, c’est un roman d’un certain Henry Winterfield, Timpetill – Die Stadt ohne Eltern (La Ville sans parents), un livre écrit à l’origine comme l’a été Le Seigneur des Anneaux, comme un conte à épisodes écrit pour un enfant. Personnellement, ce film m’a fait penser à la Guerre des Boutons, sauf que je n’ai jamais aimé la Guerre des Boutons, peut-être parce que je n’ai jamais aimé Yves Robert et que le roman de Louis Pergaud m’avait franchement barbé.
Les enfants de Timpelbach c’est avant tout un très beau film, un film avec et sur les enfants, et surtout un très beau film français. En voyant l’affiche, on se dit forcément que c’est encore un film américain, une super-production hollywoodienne créée à grand renfort de dollars et d’effets spéciaux à la Narnia et consorts, mais pas du tout, on est bien dans une belle production française dont on n’a pas à rougir. Mis à part la présence inutile d’un Gérard Depardieu bedonnant dans la peau d’un maréchal certainement russe et d’une Carole Bouquet presque pathétique en bourgeoise fantasque, la seule à tenir le haut du pavé du côté des adultes, c’est Armelle en institutrice aussi cruelle que nunuche.
L’histoire est audacieuse. Après avoir délibéré, les adultes de Timpelbach décident que leurs chères têtes blondes ont dépassé les bornes et qu’il est temps de prendre des mesures, et pour mesure, la plus radicale qui soit va leur être infligée. Les parents simulent un départ irrévocable de la ville, mais prévoient en secret de revenir le soir après une petite partie de campagne. Le problème c’est qu’ils tombent aux mains d’une légion étrangère qui voit ce déplacement massif de population comme une tentative d’invasion et se retrouvent enfermés dans des geôles sombres et humides tandis que leurs enfants sont désormais seuls dans la ville. Avec les plus grands d’entre eux, ils vont s’organiser pour subsister, car il faut bien manger, se laver, continuer à vivre en somme, mais sans les parents. Deux bandes rivales vont s’affronter pour prendre le contrôle de la ville.
Les véritables stars, ce sont les enfants, avec un casting époustouflant de très beaux garnements.
- Manfred (Raphaël Katz), une sorte de clone d’Harry Potter un peu gaffeur mais très attachant.
- Marianne (Adèle Exarchopoulos), la rousse sauvageonne, parfaitement troublante dans sa peau androgyne, meneuse d’enfants par défaut, elle est un des pivots de l’histoire.
- Thomas (Léo Legrand), le beau solitaire enragé, sauvage et repenti, un vrai petit adulte miniature, presque trop beau pour être vrai.
- Mireille (Lola Creton), la peste par excellence, un physique à la Romane Bohringer, un charme fou…
- Robert (Léo Paget), l’aristocrate précieux, finalement perspicace et surnommé “le monoclard”.
- Barnabé (Julien Dubois), le petit muet, frère de Thomas, mignon comme tout avec sa bouille d’ange sans voix.
- Le reste du casting…
Une belle brochette de jeunes acteurs généralement très bons, pour certains au jeu parfois assez inégal ce qui ne fait pas oublier qu’on est au cinéma, mais tous sont certainement très prometteurs.
Finalement, les bons sont vraiment très gentils et les méchants vraiment très méchants, mais à la fin, la morale est sauve, les méchants sont matés parce qu’ils sont allés trop loin, les gentils sont toujours les gentils et les parents apparaissent finalement comme les grands irresponsables dans l’histoire. Incapables d’assumer leur autorité, ils partent et au bout du compte, les enfants s’en sortent très bien tous seuls. Une bonne leçon, pour les parents et pour les spectateurs.
Malgré une fin un peu raplapla, on en arrive presque à oublier qu’on est en train de regarder un film français, qui pour une fois, a réellement frappé un beau coup, avec de surcroit, une photographie superbe et des décors à la hauteur de leurs ambitions.