La mort de l'idée, l'image et l'avènement de l'histoire

Sarah Palin et John McCain, c’est l’image la plus terriblement conservatrice d’une Amérique rurale et blanche, mais avant tout, c’est pour l’une l’histoire de sa famille, de son fils engagé en Irak, de sa fille qui n’a pas avorté et d’elle-même qui a donné naissance à un fils trisomique, une femme qui touche le cœur des bonnes mères de famille américaines, et pour l’autre, c’est sa foi de chrétien, son sentimentalisme face aux parents qui pleurent leur fils mort au combat, ses pairs, les soldats auprès desquels il s’est battu à Hanoï.

John McCain

Barack Obama, c’est l’histoire d’un jeune métisse ambitieux à la morale irréprochable, homme bien sous tout rapport, hautement diplômé, élégant, dansant devant les caméras (parce que les Blacks ont le rythme dans la peau, c’est bien connu), à l’origine de lois contre les fraudes, le lobbying et la corruption, et c’est aussi cet homme qui en pleine campagne déclare qu’il fait une pause pour prendre l’avion, cap sur Hawaii au chevet de sa grand-mère mourante.

Barack Obama

Les élections américaines, à douze jours du scrutin, ce ne sont pas des idées, un programme, des conceptions, des vues sociales ou mêmes des opinions. Ce ne sont même plus des images, car les images ne portent plus en elles suffisamment de signifiant pour faire basculer les intentions de vote. Aujourd’hui, les élections américaines, ce sont des histoires et ce sont des histoires qui entrent en campagne, et comme dans ces joutes verbales entre comédiens de théâtre, c’est la meilleure histoire qui l’emportera.

Van Brussel naar Brugge

Ville étrange tiraillée entre deux communautés qui ne peuvent pas s’entendre. Ce qui m’a frappé en allant dans la capitale belge, c’est l’entente cordiale entre les deux communautés qui vivent ensemble sans se marcher dessus tandis que les médias font tout pour donner l’image d’un pays chaotique exacerbée par l’attitude néfaste d’hommes politiques campés sur leurs positions. La Wallonie a longtemps été beaucoup plus riche que les Flandres belges mais à présent la partie nord de la Belgique affiche un taux de chômage faible et un PIB deux fois plus important que leurs cousins du sud, du coup la Wallonie n’est plus désirable et la sécession menace car on veut se débarrasser des importuns appauvris; une attitude peu digne. C’est sans compter sur le fait qu’Anvers a supplanté Bruges à une certaine époque et qu’elle était la capitale du Royaume. Ce qui m’a frappé également, c’est un racisme ambiant très fort dès lors qu’on s’enfonce dans les terres flamandes. Y parler français est presque insultant car on est d’emblée un Wallon, mais il suffit qu’on sorte une carte d’identité française pour que le sourire revienne et que l’animosité disparaisse. Très sincèrement, j’aime beaucoup les Flandres, pour l’ambiance douce et heureuse qui y règne, pour l’ordre et l’architecture hautement réfléchie et sobre, pour la propreté et le bon goût, mais je hais cette attitude méfiante et suspicieuse envers tout ce qui parle français, à la limite de la correction la plus élémentaire et parfois franchement haineuse.

Brussels

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grève, 4ème jour

Blog en grève

[audio:http://theswedishparrot.com/xool/cccp.xol]

Non, ceci n’est pas une autre ânerie de ma part. Mettre un blog en grève n’a pas réellement de signification en soi, parce que je n’ennuie personne à le faire. Au contraire, certains en seront peut-être soulagés. Toutefois, je profite de cet événement pour mettre mon blog au repos, tout simplement parce que j’ai besoin d’un peu de repos, que le travail me crève plus que de raison et que j’ai besoin de faire un break.
Par ailleurs, je tiens à signaler que je soutiens entièrement le mouvement de grève actuel et que je l’encourage vivement. Je ne fais pas partie de ces Français qui ont amené le Président actuel au pouvoir, ni de ceux qui pensent que les avantages sociaux sont à niveler par le bas. Je ne fais pas non plus partie des gens qui pensent que parce que l’espérance de vie augmente, nous devons en subir les conséquences et attendre la mort en bleu de travail, tout simplement parce qu’un corps humain est ainsi fait que la fatigue l’engourdit lorsque l’âge l’étreint. Je ne fais pas non plus partie de ces gens qui pensent que les grévistes sont des emmerdeurs et qu’il faudrait les exterminer, et qu’au contraire le secteur privé, aidé des politiques, a tout fait ces dernières années pour comprimer le syndicalisme et la contestation, que se révolter contre des mesures injustes est un droit, voire un devoir lorsque ce sont les générations d’après qui sont impactées.
Partant de ça, je vais me mettre au vert quelques temps, histoire de ne pas m’éparpiller.

EDIT (16 novembre): 3ème jour de grève. Voilà.
EDIT (17 novembre): 4ème jour de grève. Et si après tout, il suffisait d’écouter un superbe morceau d’Henry Mancini et se dire que finalement que la vie est plus simple qu’il n’y paraît…

Dénoncer, détruire, reproduire et la relique barbare

Bien. Je vais écrire quelques mots. Ces quelques semaines se sont égrenées ici sans établir de dialogue, par la simple démonstration d’images, souvent sans légende à la manière d’un de ces croquis légers que l’on trouve dans les quotidiens. Je me sens absent, ce qui n’est pas sans vouloir dire qu’une énorme mutation semble me secouer. Cette absence manifeste se traduit également par une sensation de liberté et de retour au calme. Je ne me sens plus tellement secoué par ce flux continuel contrariant auquel j’étais soumis autrefois. Aujourd’hui, tout est différent, un peu comme si j’avais changé d’environnement du jour au lendemain et que j’avais de plus en plus de mal à reconnaître les murs entre lesquels je me trouve. Je me sens comme animé d’une nouvelle force…
J’ai l’impression de parler dans le vide, et d’ailleurs, je le fais comme s’il n’y avait personne pour lire ces mots. Étrange. Dans la même veine, je me suis surpris à rassembler tous mes carnets et à recommencer à écrire, sous forme de journal, un exercice auquel je me plie de façon compulsive en corrélation avec d’autres choses qui traversent ma vie actuellement.

Je reprends plaisir à tout, à manger, à boire, à respirer l’air pollué du dehors ou celui du matin lorsque je pointe le bout de mon nez dans le brouillard à des heures indues. J’imagine alors que je suis en train de trouver les réponses aux questions que je me pose depuis quelques années, que je pointe du doigt les angles qui nécessitent une réflexion et que je laisse de côté les points de souffrance qui ne méritent finalement pas que je m’y attarde, comme si je pratiquais avec une rigueur consciencieuse à une sorte d’ataraxie surgie de nulle part. J’imagine aussi que j’arrive à la fin de la lutte qui se jouait en moi, que j’en reviens à des convictions politiques saines et fondées, bien que totalement à contre-courant de ce qui se pratique dans les grands fonds des rangs militants bêlant de plaisir à la moindre bassesse. Je redeviens discret comme si je prenais la place qui était la mienne. J’en ai désormais fini avec les idéologies sociales avec lesquelles je n’ai décidément rien à voir, parce que c’est comme ça, je ne peux pas. L’idée de propriété, la notion de contrat social, l’opinion… tout ceci va à l’encontre de ce que je suis et de ce que je pense. Mais je ne suis pas non plus un rebelle parce que je n’emmerde personne avec mon point de vue.

J’entendais à la radio ce matin (oui, ce matin, j’ai écouté la radio) que les investisseurs se tournaient à nouveau vers l’or sous sa forme la plus manufacturé, le lingot. Cette matière première que Keynes appelait la relique barbare est à nouveau en vogue et sa demande devient de plus en forte. La raison se devine aisément ; l’Inde et la Chine, les deux super-puissances qui font tant peur, sont très demandeuses de cette matière première pour satisfaire les goûts particulièrement mauvais des classes émergentes de ces économies émergentes. La revalorisation de cette valeur refuge est pourtant un mauvais indicateur de la vie économique, car les investisseurs ont peur de l’investissement dans les valeurs traditionnelles et cela annonce une période inflationniste, ce qui n’est pas fait pour rassurer.
Tout ceci me rappelle l’époque amusante, dans les années 80, où l’on voyait René Tendron ou ses petits collègues donner les tendances de la Bourse avec les agités du bocal de la Corbeille en toile de fond et réciter sur un ton monocorde les cours du lingot et du Napoléon. Lointaine époque… J’imagine en fait qu’il n’y a pas besoin de commenter cette actualité.

Voilà où nous en sommes aujourd’hui, et moi, je me sens bien.

window and girl

Aucun rapport entre le sujet et la photo.

Po-si-tive

Bon. Alors là, je crois qu’on a touché le fond.
L’art et la manière de brasser du vent en faisant croire qu’on se préoccupe vraiment de problèmes cruciaux: La France étiquetée carbone.
Lorsque je lis “mesure destinée à modifier le comportement“, tout de suite, ça me fait penser à des choses pas jolies.
Vraiment, ces gens-là me font peur tellement ils sont éloignés de la réalité des choses.
La réalité des choses, c’est plutôt ça:

«Les étiquettes n’ont aucune efficacité directe, personne n’a arrêté de fumer en regardant le taux de nicotine sur un paquet de cigarettes», ironise Jean-Marc Jancovici, expert en énergie. «Cet indicateur extra-financier n’a d’intérêt que dans la mesure où il prépare les gens à des hausses de prix.»

Après ça, on nous demande d’être confiant dans le futur Grenelle de l’Environnement. Allez, ne faites pas la gueule, ce n’est qu’un début.

Saturation à haute dose (data & information)

Cette fois, je crois que le combat est perdu.
J’ai tenté de me soustraire du monde, et je crois… que ça a fonctionné. L’information, la télévision, la radio, les journaux, les fils d’actualités… J’ai tenté de tout réintégrer, sans succès. J’ai tenté de suivre, de m’intéresser, de faire abstraction des partis pris d’une presse qui se veut indépendante mais qui ne fait que le jeu de la pensée unique.
Même les journaux de gauche sont tombés, ils n’ont pas résisté à la déferlante réactionnaire, les derniers remparts se sont effondrés… et moi avec.
Lorsqu’en une du Parisien (je n’ai pas dit que c’était un journal de gauche), samedi, je vois écrit en gros “Victoire contre les All Blacks, 50% des Français y croient”, je me demande si je ne suis pas en train de manquer quelque chose en évinçant totalement l’actualité de mon champs de vision, ou si au contraire, on ne nous donne pas à bouffer de la merde précisément parce qu’on a perdu le sens des valeurs (au sens éthique du terme) et qu’on ne sait plus voir l’information comme quelque chose pragmatique, qui repose sur une critique des faits de société.
Quand je vois Libé qui fait sa une sur une hypothétique rupture entre le chef d’Etat et sa greluche, je ne situe plus rien, je perds mes repères. La gauche socialiste se délite parce que les historiques se demandent quelle mouche a piqué ceux de leur camp qui rejoignent la bastide sarkozyste et le gouvernement au lieu de s’interroger, d’avoir une pensée critique permettant de reconstruire ce qui a été abattu. Ils ne voient pas que l’autre réussit son coup, à grands coups de pensée unique à créer du vide avec du vide !!! Vraiment, je n’en peux plus. Alors je sors le fil RSS de Libé de mon agrégateur, je n’ai pas de temps à perdre avec ce genre de conneries. Continue reading “Saturation à haute dose (data & information)”

Argenteuil, ville puante

Le maire d’Argenteuil (Val-d’Oise), Georges Mothron, a suspendu hier l’utilisation du répulsif odorant Malodore, après avoir discuté avec la ministre du Logement, Christine Boutin, et le haut commissaire à la pauvreté,Martin Hirsch.
Ce produit visait selon lui à «éloigner 4 ou 5 personnes très alcoolisées» des issues de secours d’un centre commercial. La Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde) devait être saisie hier par un élu PCF, un militant Vert et un responsable du MRC (Mouvement Républicain et citoyen).
Malodore est employé, à l’origine, «pour limiter l’accès à des sites dangereux du type bordures de rocades ou de ponts».

Source Matinplus.net. L’article fait suite à celui-ci publié le 24 août dernier sur Libération.

Pour avoir vécu à Argenteuil et pour avoir vu et côtoyé la “nuisance” à plusieurs reprises dont il est question dans ces articles, j’avoue que l’action est particulièrement disproportionnée. La mesure est justifiée par une impossibilité de trouver une solution d’ordre sociale pour ces personnes complètement désoeuvrées. Ayant habité cette ville, je sais qu’il existe des choses beaucoup plus malodorantes que les personnes qui squattent les accès du centre commercial (qui par ailleurs est une véritable aberration). Décidément, le monsieur à groin de porcin qui dirige cette ville n’a pas fini de se comporter lui-même comme une chose malodorante.

Et in Arcadia Ego

Simon Norfolk est photographe et reporter, il parcourt le monde pour témoigner de la guerre, de l’exil, du nomadisme et de l’expatriation, de la présence de l’armée, de la politique et de l’archéologie des temps modernes.
A voir absolument, cet étonnant reportage sur les Hébrides.

Simon Norfolk

Défaut de transmission

Je me pose souvent des questions, je ne sais pas faire grand-chose d’autre. Mes dix doigts sont peu souvent sollicités pour des activités manuelles et je passe une bonne partie de mon temps à réfléchir, c’est un de mes grands défauts. Le problème, quand on réfléchit, c’est qu’on se pose des questions (ce qui est, j’en conviens, une attitude incompatible avec la religion) et les questions amènent des remises en questions, non pas forcément de soi, mais de ce qu’on pense. Et j’ai longtemps cru que la culture, pour ne citer qu’elle, était destinée à satisfaire de vils instincts d’autosatisfaction, mais je me suis trompé, et il n’est pas exclu que par la suite, je revienne encore sur cette opinion.

J’ai passé samedi soir une soirée horrible. En fait, j’étais invité par mon ami Laurent pour son anniversaire, et nous avons passé une soirée fraîche dans son appartement décoré avec simplicité mais avec beaucoup de goût, ce qui, pour un garçon est suffisamment rare pour être remarqué. Nous avons bien mangé, bien bu, etc. et je me suis rendu compte qu’en plus des sujets de discussion traditionnels sur lesquels il ne faut pas deviser entre amis, c’est à dire la religion, la politique et l’amour – hein ? – il fallait également éviter de parler culture. Etrange, me direz-vous, car que reste t-il ? Le travail, ça va cinq minutes, le cul, ça ne se fait pas…

Dizzie

Tout est parti en vrille – à mon sens – lorsque la copine du frère de Laurent a demandé ce qu’était qu’un bobo ? Toutes les définitions y sont passées, du tout au n’importe quoi, et pour une fois, la discussion prenait un tour étrange, car personne n’avait envie de rire, tout le monde semblait étrangement impliqué et trop sérieux à mon goût. Je n’ai pas pu m’empêcher de réagir lorsque j’ai entendu des inepties du genre “ce sont des gens qui ont des idées de gauche et qui…” ou alors “ce sont des gens qui ont de l’argent et qui…“, voire même “ce sont des gens qui sont dans le milieu de la culture et qui…“… Arghhhhh, VOS GUEULES !!! Silence !! Premièrement, on s’en fout des bobos. “Oui mais moi je suis une bobo et j’assume bien…“. OK, super, sujet suivant. Bref, les bobos, c’est pas le sujet. En l’occurrence, c’est que les deux personnes avec qui je tentais d’avoir une discussion sont deux personnes qui se considèrent comme des bobos, même si l’un des deux s’en est vigoureusement défendu – avec force “Ah mais de quoi on parle là, je ne comprends pas…“, et accessoirement, ce sont deux relations de travail* avec qui nous entretenons une relation de haine cordiale basée sur peu de choses (ils détestent mon humour, ou plutôt ils ne rigolent qu’au leur, faible et basé sur la répétition, et je ne fréquente pas les mêmes lieux – ajouté à cela qu’ils ne connaissent strictement rien à ma vie, ni à ce que je fais en dehors du travail et qu’ils me considèrent comme une sorte d’animal sans vie, mais les apparences sont parfois trompeuses et contrairement à eux, je n’expose pas ma vie privée et sexuelle sur la place du marché). Là où je me suis insurgé, c’est lorsqu’il a été question de culture, puisque selon leurs termes, le bobo est dans le milieu de la culture, sous-entendu que la culture c’est un peu comme la merde, il faut avoir les deux pieds dedans pour la sentir. Mais de quoi parlons nous ? Du dernier vernissage d’untel ? De l’exposition Yves Klein ? Du dernier livre de Houellebecq ? Le problème avec les gens qui ont de l’argent et ne se privent pas, c’est qu’ils ont un peu trop tendance à croire qu’il suffit de s’acheter une cafetière Nespresso (What else ?), d’écouter Mylo (qui n’est par ailleurs qu’un tromblon de sous-culture bruyante), de ne pas s’habiller chez Hennes and Mauritz (H&M pour ceux qui n’auraient pas compris), d’habiter dans le XXè ou dans le Marais et de connaître plein de monde dans le monde de la CULTURE (criez pour vous rendre compte de l’effet) ou de manger dans des lieux branchés pour être un bobo, ou quoi que ce soit d’autre…

Bilbliothèque

Je n’ai pas voulu être condescendant, méprisant ou exclusif – je leur laisse ce privilège – mais la culture, c’est un petit peu autre chose que tout ce que je viens d’énumérer, d’une manière non exhaustive et passablement ironique (oui, j’ai réponse à tout), parce que la culture se niche partout et c’est dans sa transmission et dans le partage qu’elle trouve son essence, c’est à dire exactement le contraire que le milieu dans lequel évoluent ces gens. J’ai dit une chose que je pense vraie, à mon corps défendant, j’ai dit que les bobos étaient des opportunistes qui n’évoluaient dans des milieux branchés plus par intérêt que par conviction et opinion, et je le maintiens a fortiori après cette soirée. J’avais envie de leur dire de visiter mon blog, ne serait-ce que pour avoir une autre approche de la culture, moi qui n’en suis qu’un factotum, mais je n’ai pas voulu qu’ils prennent cela pour la prétention.

Sur ces entrefaites, je vais préparer mes lasagnes, parce que la culture c’est aussi comme ça, c’est comme les domestiques, ça passe aussi par la cuisine.