Bruce Chatwin et ses Moleskine

Moleskine

Je pris une douche et préparai mon sac. J’y entassai une pile de mes vieux carnets noirs. C’étaient les carnets qui m’avaient servi pour le livre sur les nomades et que j’avais conservés quand j’ai brûlé le manuscrit. Je n’avais pas ouvert certains d’entre eux depuis au moins dix ans. Ils renfermaient un méli-mélo de notations presque indéchiffrables, de « pensées », de citations, de brèves rencontres, de notes de voyage et d’embryons d’histoire… Je les avais apportés en Australie car je comptais bien m’isoler quelque part dans le désert, loin des bibliothèques et du travail des autres hommes, et jeter un regard neuf à leur contenu.


Ayers RockPhoto © Reto Fetz

« Cela ne vous dérange pas que je me serve de mon carnet ? demandai-je.
– Non, je vous en prie. »
Je sortis de ma poche un carnet noir à la couverture vernie, fermé par un grand élastique.
« C’est un beau carnet, dit-il.
– Je l’ai acheté à Paris, dis-je. Mais maintenant on en a arrêté la fabrication.
– Paris ? » répéta-t-il en levant les sourcils comme s’il n’avait jamais rien entendu d’aussi prétentieux.

Bruce Chatwin, le chant des pistes, 1987

2 Replies to “Bruce Chatwin et ses Moleskine”

  1. “un méli-mélo de notations presque indéchiffrables, de « pensées », de citations, de brèves rencontres, de notes de voyage et d’embryons d’histoire.”

    ça me fait penser à quelqu’un, mais qui ? qui ? pfff…

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